Le Bénin vient de dépénaliser l'avortement, une percée sur un continent à la traîne en termes de droit à l'IVG
Les avortements clandestins seraient, aujourd'hui encore, à l’origine de 13% de la mortalité maternelle sur le continent.
Le Parlement béninois a fait avancer le droit des femmes. Malgré la pression de l'église, très influente dans le pays, le Bénin a légalisé le droit à l’avortement jusqu'à douze semaines.
200 femmes meurent chaque année au Bénin
Promulguée le 20 décembre 2021, la nouvelle loi autorise l’avortement à la demande de la femme enceinte "lorsque la grossesse est susceptible d’aggraver ou d’occasionner une situation de détresse matérielle, éducationnelle, professionnelle ou morale".
L'IVG était jusqu’à ce jour interdite dans le pays, sauf lorsque la grossesse était la conséquence d’un viol ou d’une relation incestueuse ou en cas de risque pour la vie de la femme. Ce texte de loi a déclenché une levée de boucliers, notamment de la Conférence épiscopale du Bénin qui a affirmé dans un communiqué que "la légalisation de l'avortement est la culture de la mort". Mais pour le ministre béninois de la Santé Benjamin Hounkpatin, "il s’agit d’une loi permettant de sauver et de préserver des vies humaines, en l’occurrence celles des femmes des méfaits des avortements clandestins, de la déscolarisation précoce et de l’accroissement de la pauvreté".
Au moins 200 femmes meurent chaque année au Bénin des suites de complications d’un avortement, selon les chiffres du gouvernement. La légalisation de l’avortement va "permettre de soulager les peines de nombreuses femmes qui, face à la détresse d’une grossesse non désirée, se trouvent obligées de mettre leur vie en jeu", a ajouté le ministre béninois de la Santé.
"L'Afrique subsaharienne a le taux le plus élevé de décès liés à l'avortement au monde, avec 185 décès maternels pour 100 000 avortements. Néanmoins, cela représente une baisse des deux cinquièmes depuis 2000, qui s'est produite en partie en raison des améliorations de la sécurité de l'avortement et des soins après avortement."
Etude du Guttmacher InstituteRapport 2020
L'IVG dépénalisée dans une dizaine de pays sur 54
Le Bénin a donc rejoint le petit club des pays africains à avoir dépénalisé l’avortement. A commencer par la Tunisie très en avance, puisque le droit à l’IVG a été inscrit dans la loi dès 1973 (deux ans avant la France), de l’Afrique du Sud, de l’Angola, du Cap-Vert, de la Guinée-Bissau, du Bostwana, du Liberia, du Mozambique et de la Zambie.
L’avortement est en revanche entièrement interdit en Egypte, en Mauritanie, au Sénégal, en Sierra Leone, au Congo et à Madagascar. Au Maroc, le Code pénal permet depuis 2020 d’avorter en cas de viol, d‘inceste, de malformation du fœtus ou de troubles mentaux chez la femme à condition d’en faire la demande auprès de la justice, une décision prise après quatre ans de négociations au Parlement.
D'après une étude du Guttmacher Institute datant de 2020, "durant la période de 2015-2019, plus de 6,5 millions de grossesses non désirées ont été recensées en Afrique de l'Ouest", tout particulièrement chez les jeunes filles (15-19 ans). Ce même rapport indique que "huit millions d’avortements ont été pratiqués en Afrique subsaharienne (durant cette même période), dont les trois quarts n’étaient pas sécurisés pouvant entraîner des complications médicales, voire la mort de la femme". Au Burkina Faso, 72% des avortements étaient réalisés par un personnel non médical, c’est également le cas pour 63% des avortements au Sénégal. Aujourd’hui encore, les avortements dangereux seraient responsables de 13% de la mortalité maternelle en Afrique.
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