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Lionel Zinsou : il a conquis le cœur des Béninois en reconnaissant sa défaite

De mémoire de Béninois, jamais un candidat à la présidence n’avait reconnu sa défaite avec autant de fair-play. En félicitant son adversaire pour sa victoire bien avant que les résultats officiels ne soient publiés, Lionel Zinsou a suscité une vague de sympathie et d’admiration au-delà de son camp. Un bon investissement pour son avenir politique.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Lionel Zinsou pendant sa campagne électorale le 31 janvier 2016 à Cotonou (Photo AFP)

 
C’est tellement rare sur le continent que les Béninois ne sont pas prês de l’oublier. Dans la soirée du 20 mars 2016, alors que la tension monte à Cotonou dans l’attente des résultats officiels du deuxième tour de la présidentielle, Lionel Zinsou décroche son téléphone pour féliciter son adversaire.
 
«Je l’ai félicité pour sa campagne, pour son projet et je lui ai souhaité bonne chance. Je voulais qu’il n’y eût aucune appréhension. Je crois que ça a créé quelque chose comme un soulagement », confie Lionel Zinsou à la presse.
 
Son coup de fil a coupé ainsi court aux spéculations et aux rumeurs et a fait tomber la tension qui commencait à monter dans le pays.
 
Le formidable perdant
Les militants de Lionel Zinsou sont un peu sonnés avant de réaliser la grandeur du geste de leur candidat.
 
«Je suis très fier de ce comportement que je n’ai jamais vu au Bénin. Il a donné une très bonne leçon en tant qu’homme d’Etat pour montrer qu’avant tout nous sommes appelés à rester ensemble», s’exclame un militant de l’Alliance Républicaine qui l'a soutenu.
 
«Il vient de prouver qu’il aimait ce pays», renchérit un autre militant.  Même ses détracteurs ont été surpris par une attitude inhabituelle dans la vie politique de leur pays. Des réactions qui ont comblé Lionel Zinsou.
 
«Ce qui m’a ému le plus, c’est les nombreux témoignages d’électeurs de Patrice Talon qui me sont parvenus par centaines pour me dire : ça c’est quand même étonnant ce que vous avez fait, ça ajoute à notre démocratie, confie Lionel Zinsou à RFI.
 

Lionel Zinsou face à la presse le 20 Mars 2016 à Cotonou au Bénin (Photo Reuters/Charles Placide Tossou)

Les Béninois ont de quoi être fiers. Rares sont les pays africains qui n’ont pas connu de tragédies postélectorales. Des bains de sang chez leurs voisins togolais ont ponctué les rendez-vous électoraux de ces dix dernières années. Dans la sous-région, la Côte d’Ivoire a connu, en 2010, une crise électorale sanglante qui a failli plonger le pays dans la guerre civile. Ou encore le Burundi où les violences consécutives à une élection controversée en 2015 ont jeté des centaines de milliers de citoyens sur les routes de l’exil.
 
«Un grand homme au fair play admirable»  
Pourtant Lionel Zinsou n’a pas été épargné par son adversaire durant toute la campagne électorale. Patrice Talon n’a pas hésité à le traiter de «parachuté par la France», l’ancienne puissance coloniale. Pourtant, lui aussi a tenu à saluer son adversaire qu’il a qualifié de grand homme au fair-play admirable.
 
«C’est un geste que j’ai beaucoup apprécié et je l’en félicite. Cela prouve bien que notre démocratie est en marche», a déclaré le nouveau président élu lors d’une conférence de presse à Cotonou. De quoi réconforter le candidat malheureux. D'ailleurs, Lionel Zinsou n’entend pas s’éclipser de la scène politique de son pays.
 
«A partir du moment où vous avez été premier au premier tour. Et du moment où vous avez eu un million de voix sur trois millions de suffrages. Quand vous vous promenez dans la rue et qu’une personne sur trois vient vous dire, ah comme je suis triste que ce ne soit pas vous. A ce moment là, ça vous crée le devoir de les accompagner dans l’avenir», a-t-il confié à RFI.
 
Lionel Zinsou attend de voir la nouvelle configuration du paysage politique béninois qui va se mettre en place d’ici quelques mois, avant de procéder à la formation «d’un groupe d’idées pour l’avenir du Bénin».
 
C’est dire qu’il n’est pas exclu qu’il soit de nouveau au rendez vous dans cinq ans. Le nouveau président qui prendra ses fonctions le 6 Avril 2016, s’est engagé à exercer un seul et unique mandat à la tête du pays.

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