Abidjan : quand les fanicos transforment la rivière Banco en lavoir géant
Laver le linge au beau milieu de la rivière n'est pas un folklore. C'est le métier de centaines de lavandiers de la capitale économique de la Côte d'Ivoire.
Au nord d’Abidjan, dans le parc du Banco, la rivière portant le même nom est le théâtre d’une activité peu banale. Savon, eau et huile de coude, ils sont plusieurs centaines d’hommes à laver du linge au milieu du cours d’eau. On les appelle des fanicos, un terme qui, en langue locale, veut dire lavandier. Car c’est le linge des autres qu’ils lavent. Travail éprouvant réalisé presque exclusivement par des hommes en raison de la pénibilité du métier.
Au fil du temps, la technique s’est rodée. Les fanicos, dans l’eau boueuse jusqu’aux genoux, frottent et frappent le linge sur une grosse pierre ou un bloc de béton posé sur un pneu de camion. Un pneu suffisamment lourd placé au fond du cours d’eau. Ils travaillent côte à côte, peu importe que le linge d’à côté soit très sale, ou en cours de rinçage.
Quel risque pour la santé ?
Aucune désinfection non plus. Les fanicos utilisent un savon artisanal, le cabakrou, pas vraiment bio. Une fois lavé, le linge est mis à sécher sur les berges de la rivière, le plus souvent sur l’herbe.
Quant à la question d’évacuer ces lavandiers, elle est sensible, tant ce site est devenu une attraction à Abidjan. Un célèbre lessivier a même donné le nom de fanico à un savon. Certes, l’écoulement de la rivière est contrarié par ces postes fixes de lavage. Mais pour l’heure, les inondations que cela provoque parfois ne font pas bouger les autorités. Tout comme les risques pour la santé que comporte le travail dans une eau à la qualité plus que douteuse. Car il n’y a pas que le linge qu’on lave dans la rivière. Voitures, tapis, matelas, tout y passe, y compris les animaux.
Bel exemple une nouvelle fois d’une activité informelle qui fait vivre son monde. Certains lavandiers prétendent gagner 6000 francs CFA (9,16 euros). C'est peu, mais il n’y a quasiment pas de frais. L’eau est gratuite et le savon, le cabakrou, très économique, coûte 100 francs CFA le pain (0,15 euro).
Et cette activité est plébiscitée, et possède sa clientèle, surtout des hommes vivant seul. N’ayant pas le temps de laver leur linge, ils s’en remettent aux fanicos. Et ils font de sérieuses économies, car faire tourner le lave-linge coûte cher.
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