Cet article date de plus de quatre ans.

Tidjane Thiam quitte Credit Suisse

La démission du directeur général de Credit Suisse intervient après une série d'affaires d'espionnage impliquant le groupe bancaire que Tidjane Thiam a dirigé pendant cinq ans.

Article rédigé par franceinfo Afrique avec AFP
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le patron démissionnaire de Credit Suisse Tidjane Thiam, le 23 janvier 2018, à l'ouverture du Forum économique mondial qui se tient chaque année à Davos, en Suisse. Sa démission sera effective le 14 février 2020.     (FABRICE COFFRINI / AFP)

C'est fini entre Tidjane Thiam et Credit Suisse ! La banque a annoncé vendredi 7 février 2020 la démission de son directeur général, le Franco-Ivoirien Tidjane Thiam, qui paye les conséquences d'un scandale d'espionnage industriel. Les opérations visaient d'anciens cadres dirigeants de la banque et l'organisation Greenpeace.

En remettant sa démission, ce dernier a réaffirmé ne pas avoir été au courant de ces filatures. "Je n'avais aucune connaissance de l'observation de (ces) deux anciens collègues", a-t-il déclaré dans un communiqué. "Cela a incontestablement perturbé Credit Suisse", a-t-il ajouté. "Je regrette ce qui est arrivé et qui n'aurait jamais dû avoir lieu", a-t-il insisté.

L'affaire qui vaut son poste à Tidjane Thiam trouve son origine dans le départ, l'été dernier, chez la concurrente UBS de l'ancien directeur de la branche gestion de fortune de Credit Suisse, Iqbal Khan. Redoutant que ce banquier star ne débauche d'ex-collaborateurs, Credit Suisse a monté une opération de surveillance, recrutant des détectives privés pour le prendre en filature. La mission a duré entre le 4 et le 17 septembre 2019, date à laquelle Iqbal Khan a repéré ces détectives alors qu'il circulait dans Zurich avec son épouse. Sa plainte pour menace et coercition a fait éclater l'affaire, ébranlant un milieu bancaire suisse plus habitué à la discrétion.

Un proche impliqué dans le scandale

Credit Suisse avait ordonné une enquête interne, confiée à un cabinet d'avocats, et annoncé début octobre 2019 la démission avec effet immédiat de Pierre-Olivier Bouée, alors directeur opérationnel. Le cadre était considéré comme le bras droit de Tidjane Thiam. Les deux hommes se sont connus chez McKinsey et leurs carrières ont suivi des trajectoires très proches, passant tous deux chez Aviva et Prudential avant de rejoindre Credit Suisse.

Selon cette enquête interne qui a innocenté Tidjane Thiam, Pierre-Olivier Bouée avait ordonné "seul" cette surveillance, de sa propre initiative, sans en référer à sa hiérarchie, avec pour objectif de protéger les intérêts de la banque. Mais l'affaire avait subi un nouveau rebondissement en décembre, lorsque la banque avait reconnu un second cas d'espionnage visant cette fois l'ancien directeur des ressources humaines, Peter Goerke. Et de rejaillir début février 2020 avec de nouvelles révélations dans la presse dominicale.

Selon le SonntagsZeitung, la surveillance aurait également visé l'organisation écologiste Greenpeace qui aurait été infiltrée afin d'anticiper ses actions chocs visant la banque. Pierre-Olivier Bouée avait fait espionner l'ONG à la suite d'une intrusion de ses militants lors d'une assemblée générale des actionnaires du groupe en 2017.

Tensions avec le président de Credit Suisse 

D'après plusieurs sources proches de la banque, indique Reuters, cette accumulation d'affaires a tendu les relations entre Tidjane Thiam et Urs Rohner. "La relation entre le directeur général et le président de la banque étaient devenues exécrables, à tel point que les médias helvétiques se demandaient lequel des deux allait jeter l’éponge", confirme l’Agence Ecofin. "Finalement, c’est le président, très représentatif du microcosme bancaire zurichois, qui a eu gain de cause", poursuit le site d’informations. Le conseil d'administration de Credit Suisse, qui s'est réuni le 6 février 2020, a réaffirmé son soutien à son président Urs Rohner afin qu'il reste jusqu'au terme de son mandat en avril 2021.

Tidjane Thiam, recruté en 2015 par Credit Suisse, est l'architecte d'une vaste réorganisation de l'établissement qu'il a réorienté vers la gestion de fortune. Le scandale aura eu raison de son bilan positif à la tête du deuxième plus grand groupe bancaire suisse. "C'est grâce à lui que la banque est de nouveau solide et a renoué avec les bénéfices", a reconnu Urs Rohner, rapporte l'Agence Ecofin. 

Dans le communiqué publié ce 7 février, la banque précise que la démission de Tidjane Thiam prendra effet le 14 février 2020 dans la foulée de la publication des résultats annuels de la société. 

Son successeur Thomas Gottstein a fait toute sa carrière dans le secteur bancaire, d'abord chez UBS (1990-1999), puis au sein de Credit Suisse, alternant les postes entre Londres et Zurich.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.