Du bateau à l'avion : Djibouti et l'Ethiopie s'allient pour devenir la plaque tournante du fret en Afrique
L'objectif est de récupérer une partie du fret qui arrive à Dubaï en bateau et repart sur le continent africain par avion.
Les compagnies aériennes Ethiopian Airlines et Air Djibouti se sont associées avec le port de Djibouti afin de proposer un hub de fret aéro-maritime depuis l'aéroport de Djibouti. La marchandise déchargée des bateaux sera ensuite acheminée par voie aérienne vers tout le continent africain.
C'est une très belle opération pour Ethiopian Airlines qui renforce sa position sur le segment du fret aérien en Afrique. Déjà, en raison du coronavirus, la compagnie avait l'an dernier transformé une partie de sa flotte en avions-cargos. Cette fois, elle s'inscrit dans la durée et pérennise ainsi une activité qui devrait doubler grâce à cet accord. Dans l'alliance, Air Djibouti ne lui fera guère d'ombre, ne disposant que d'un seul avion-cargo contre onze pour la compagnie éthiopienne.
A première vue, le mariage semble déséquilibré. En fait, les deux pays ont des intérêts distincts. Si Ethiopian poursuit le développement de son offre cargo, pour Djibouti il s'agit d'attirer le trafic maritime vers ses ports modernes et bien équipés, et devenir ainsi une destination incontournable de l'Est africain. Car pour l'heure, le port de Djibouti est un peu un cul-de-sac, sans hinterland, dont le seul intérêt commercial semble être le débouché maritime de l'Ethiopie.
Une cible : Dubaï
Des intérêts distincts, mais une cible commune : l'émirat de Dubaï. A l'heure actuelle, 850 000 tonnes de marchandises destinées à l'Afrique transitent chaque année par Dubaï, où déchargées de bateaux elles partent rejoindre le continent africain par les airs. Les deux partenaires africains espèrent mettre la main sur la moitié de ce volume et pour cela ils possèdent de sérieux atouts.
En premier lieu, la position géographique de Djibouti, à l'entrée de la mer Rouge, est un argument de taille. Pas de crochet vers le Golfe persique qui rallonge les distances, et Djibouti représente également une escale potentielle sur la route commerciale entre l'Europe et la Chine. "Quand on compare à Dubaï, cela représente 2 à 3 jours de déroutement de moins pour un navire. Or, une heure de navigation représente des milliers de dollars pour une compagnie maritime", fait valoir Wahib Daher Aden, PDG du port polyvalent de Doraleh.
La Chine omniprésente
Or justement, les marchandises chinoises assurent la moitié de ce fret aérien convoité venant de Dubaï à destination de l'Afrique. Et la Chine ne cache pas son intérêt pour Djibouti. C'est elle qui a financé et construit la ligne de chemin de fer entre Djibouti et Addis-Abeba. On la retrouve dans le projet, en cours de réalisation, d'une zone franche sur le nouveau port. C'est une société chinoise qui gère les terminaux depuis que Djibouti a remercié DP World, société appartenant au gouvernement de ...Dubaï !
Quand Djibouti se rêve en nouveau Dubaï !
C'est la China Merchants Bank qui finance, en partie, la construction de la future cité d'affaires en lieu et place de l'ancien port de Djibouti. Un chèque de 350 millions de dollars pour un projet pharaonique. 84 hectares de bureaux, hôtels, centre de congrès et commerces devraient créer 20 000 emplois directs.
"Ce futur quartier d’affaires ultra-moderne sera réalisé en six phases et sera doté à terme de deux tours jumelles, d’un grand hôtel de luxe, d’un gigantesque centre commercial, d’une salle d’exposition, d’un port de plaisance, d’un terminal de croisière, d’un aquarium…", explique le journal djiboutien La Nation.
C'est enfin Pékin qui amarre ses navires de guerre dans sa base navale djiboutienne, la seule qu'elle entretient hors du pays.
Autant d'éléments qui laissent à penser que les deux alliés africains n'auront pas trop de mal à récupérer les marchandises chinoises qui passent par Dubaï.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.