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Pétrole et gaz: «Non, l’Afrique n’est pas un nouveau Moyen-Orient»

On dit que l’Afrique dispose de très importantes réserves de pétrole et de gaz. Certains avancent même que les nouveaux champs gaziers mis à jour récemment vont repositionner le continent sur la carte de la fourniture énergétique mondiale. C’est excessif, tempère Jean-Pierre Favennec. Le président de l’Association pour le développement de l’énergie en Afrique s’est confié à Géopolis.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Une plateforme de production pétrolière et gazière à Amenam, dans le Delta du Niger au Nigeria. Le pays a été classé premier producteur africain de pétrole en 2017 devant l'Angola. Avec 1,6 million de barils par jour. (Photo AFP/Pius Utomi Ekpei)

De l’Algérie au Mozambique en passant par le Nigeria, l’Angola, le Sénégal et la Mauritanie, les réserves de pétrole et de gaz naturel sont importantes, reconnaît Jean-Pierre Favennec, consultant et spécialiste des questions pétrolières et énergétiques. Mais pour lui, le poids de l’Afrique reste relativement limité sur le plan mondial.

«L’Afrique pèse seulement 10% des réserves mondiales de pétrole et environ 7 à 8% des réserves de gaz dans le monde. Il est vrai que récemment on a fait pas mal de découvertes de pétrole et de gaz, mais l’Afrique n’est pas un nouveau Moyen-Orient», tempère-t-il.

Une production pétrolière stationnaire
Selon certains économistes, la production de pétrole africain a déjà atteint son apogée. Soit près de 8,5 millions de barils par jour. Ils prévoient même une légère baisse qui pourrait intervenir à l’horizon 2035.

«Le pétrole en Afrique concerne essentiellement l’Algérie et la Libye au Nord, et l’Egypte pour une moindre mesure. Quant à l’Afrique subsaharienne, les deux gros producteurs de pétrole, c’est d’une part le Nigeria et d’autre part l’Angola. La production de pétrole du Nigeria et de l’Angola s’élève à deux millions de barils par jour pour chaque pays. Soit au total, environ 4% de la production mondiale», explique Jean-Pierre Favennec à Géopolis Afrique.

Quant aux autres pays producteurs africains, il note que leurs productions restent limitées.

«La production du Ghana est montée récemment à 300.000 barils par jour. Et vous avez traditionnellement des pays comme le Gabon, le Congo Brazzaville et la Guinée Equatoriale qui produisent entre 200.000 et 300.000 barils par jour. Ce sont des productions pétrolières qui existent depuis longtemps, qui se maintiennent et qui devraient rester au même niveau à mon avis.»


Des enjeux importants autour du gaz naturel liquéfié
En 2015, Jean-Pierre Favennec avait été impressionné par les découvertes de gaz naturel dans le canal du Mozambique. Il estimait à l’époque que le Mozambique et la Tanzanie allaient, à eux seuls, peser l’équivalent du Qatar en termes de gaz naturel liquéfié. Il a depuis revu ses estimations à la baisse.

«Actuellement, le Qatar produit à peu près 80 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié par an. Le Nigeria doit être entre 20 et 25 millions de tonnes. Les projets qui sont envisagés, que ce soit au Mozambique, au Sénégal ou en Mauritanie, sont de l’ordre de 5 millions de tonnes au maximum. Donc on n’est pas sur les mêmes ordres de grandeur. Maintenant, il est clair que pour ces pays, ce sont des enjeux importants», précise-t-il. 

Sur le continent, quatre principaux projets de liquéfaction de gaz naturel sont en activité, notamment au Nigeria, en Algérie, en Angola et en Guinée Equatoriale. Des unités qui vont se multiplier avec les découvertes récentes de champs gaziers un peu partout.

Le Gaz naturel va-il changer la donne et prendre la relève du pétrole africain dans les prochaines années? Jean-Pierre Favennec pense qu'il faut rester prudent.

«Actuellement, il y a surproduction de gaz dans le monde. Le prix du gaz est relativement bas. Autant les exportations de pétrole ont apporté beaucoup de richesses, autant l’exportation du gaz ne rapporte pas la même quantité d’argent. Le rapport de richesses que peut amener le gaz n’est pas le même. Tout simplement parce que le pétrole est liquide est se transporte facilement à un coup très bas. Alors que le transport du gaz coûte excessivement cher.»

Le gaz naturel pour l'électrification de l'Afrique
Mais si le gaz naturel ne fera pas de miracles à court terme, explique Jean-Pierre Favennec, il peut constituer un atout incontestable qui pourrait changer la donne dans le secteur-clé de l’électrification de l’Afrique.

«Le gaz est un produit idéal pour produire l’électricité. C’est moins cher et moins polluant que le charbon et le pétrole. A partir des réserves soit du Mozambique, soit de la Tanzanie, du Sénégal ou de la Mauritanie. Ou tout simplement de pays comme le Nigeria ou le Ghana, qui a commencé à produire pas mal de gaz, on peut faire beaucoup d’électricité qui pourrait être utilisée pour l’ensemble du continent.»

De quoi rassurer ceux qui s’inquiètent du déficit criant en énergie électrique qui paralyse l’activité économique dans de nombreux pays subsahariens.

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