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Les jacinthes d'eau envahissent Lagos, la mégapole du Nigeria

Engorgée par ses bouchons routiers, la ville ne peut même pas compter sur ses voies d'eau.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des barques naviguent au milieu des jacinthes d'eau dans un bidonville de Lagos. (SUNDAY ALAMBA/NBC/AP/SIPA / AP)

Mégapole de vingt millions d'habitants, Lagos est connue pour ses routes bloquées et ses embouteillages sans fin. Mais sa lagune et les canaux qui la traversent sont également encombrées par un autre type d'envahisseur : la jacinthe d'eau (Eichhornia crassippes). Laquelle est considérée par les spécialistes comme "l'une des pires plantes aquatiques invasives dans le monde".

Mystérieusement importée d'Amérique du Sud, cette plante se répand à toute vitesse, asphyxiant les eaux et toute espèce aquatique, rapporte l'AFP. Aujourd'hui, les pêcheurs doivent déserter les rivages de la rivière Ogun, dans le nord de l'Etat de Lagos, totalement recouverte par les herbes. 

Pendant la saison des pluies, lorsque des trombes d'eau s'abattent du ciel, Lagos et sa lagune se recouvrent désespérément d'un vert intense liée à la jacinthe d'eau. "C'est une plante saisonnière, surtout visible pendant les pluies", explique à l'AFP un militant écologiste et habitant de Makoko, un ancien village de pêcheurs construit sur pilotis avec des matériaux de récupération, avalé par la ville. Dans ce qui est maintenant un immense quartier d'une grande pauvreté, "la plante apparaît partout lorsque les pluies sont fortes et que le niveau de sel est plus bas", poursuit le militant. Une catastrophe pour les dizaines de milliers de membres de cette communauté qui vivent des revenus de la pêche.

L'approvisionnement en poisson menacé

La jacinthe d'eau est apparue pour la première fois au Nigeria au début des années 1980, à l'ouest de Lagos, dans les criques de Badagry, arrivant du Bénin voisin. Quarante ans plus tard, d'épais tapis de la plante invasive recouvrent toutes les rivières du Sud, jusque dans le Delta du Niger, cœur pétrolier du pays.

Une étude de l'Université Obafemi Awolowo, dans l'Etat d'Osun, estime que le tiers de l'approvisionnement local en poisson, base alimentaire bon marché pour des millions de Nigérians, est menacé. La jacinthe "est devenue une menace pour les écosystèmes marins de Lagos", explique Nkechi Ajayi, représentant des autorités en charge des voies fluviales de l'Etat de Lagos. "Cela a aussi un impact important sur les activités socio-économiques" de la mégapole, ajoute-t-il.


Navigation à travers des plants de jacinthe d'eau à Oyo, près de Lagos (REUTERS - GEORGE ESIRI / X00996)

L'activité des transporteurs est elle aussi touchée par la jacinthe, qui abîme les moteurs, les hélices des bateaux et cause des accidents. "Il est de plus en plus difficile de naviguer avec ces mauvaises herbes partout", rapporte le capitaine John Ibikunle, en attendant que ses quelques dizaines de passagers embarquent vers Lagos Island. Une situation préoccupante alors que le gouvernement de l'Etat de Lagos veut encourager le transport fluvial pour décongestionner les routes saturées de voitures.

Paniers et électricité

Le directeur de l'Agence des voies navigables de l'Etat de Lagos (Lagos State Waterways Authority), Abisola Kamson, assure avoir installé deux machines pour éliminer la jacinthe d'eau des canaux. "Ces machines agissent comme une tondeuse à gazon sous-marine. Elles coupent les plantes et les stockent à bord", explique-t-il.

Reste à savoir quoi faire avec ces tonnes de déchets verts... Certains entrepreneurs proposent des solutions. L'un d'eux,  Achenyo Idachaba, a fondé une entreprise, appelée MitiMeth, pour transformer la plante invasive en paniers et sacs tissés à la main. "Les jacinthes coupées sèchent au soleil et sont ensuite transformées en petites cordes à tisser", raconte-t-il avec fierté.

Mais seul un plan de grande envergure pourra permettre de mettre un terme à ce désastre écologique. Des scientifiques de l'Université de Lagos travaillent à transformer ces herbes en biomasse pour créer de l'énergie. Et contribuer à pallier les pénuries chroniques d'électricité dans l'une des mégapoles les plus polluées de la planète.

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