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Au Mozambique, l'aide alimentaire s'échange contre de l'argent ou du sexe, selon Human Rights Watch

L’organisation de défense des droits humains demande une enquête sur de nombreuses allégations.

Article rédigé par franceinfo Afrique avec AFP
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Des femmes déplacées font la queue lors d'une distribution de colis fournis par le Programme alimentaire mondial dans le district de Matuge, dans le nord du Mozambique, le 24 février 2021.  (ALFREDO ZUNIGA / AFP)

L'ONG Human Rights Watch a dénoncé des cas d'abus, notamment sexuels, lors de distributions d'aide alimentaire dans le nord-est du Mozambique. La province de Cabo Delgado est en proie à une grave crise humanitaire provoquée par une insurrection jihadiste qui dure depuis presque quatre ans. On compte à ce jour plus de 800 000 déplacés.

La double peine

Pour organiser l'aide humanitaire, les autorités locales listent d’abord les personnes déplacées par les violences. Il faut donc s’inscrire pour avoir droit à la distribution de rations alimentaires. Farine, huile, riz… des stocks entiers fournis par des organisations internationales et distribués par des fonctionnaires locaux de la province de Cabo Delgado. Mais tout ne se passe pas toujours comme prévu. Selon Human Rights Watch (lien en anglais), des travailleurs humanitaires abusent de leurs postes d'influence pour exiger des faveurs sexuelles ou de l'argent de certaines femmes en échange d’aide.

"C'est très répandu, c'est une pratique courante"

Zenaida Machado, chercheuse chez Human Rights Watch (HRW)

à l'AFP

Abus, tabou et impunité

Une enquête (lien en anglais) publiée par le Centre pour le journalisme d’investigation au Mozambique révèle que des travailleurs humanitaires vendaient aux déplacées les colis alimentaires et si elles n’avaient pas d’argent, ils leur proposaient de payer en nature. Les fonctionnaires s’appuient souvent sur le fait que les personnes déplacées ne sont pas enregistrées et en profitent pour les manipuler sachant qu’elles sont dans le besoin.

"Tout cela se passe dans un contexte où les personnes déplacées sont fragiles, avec des femmes et des enfants vulnérables"

Edson Cortez, directeur de l’ONG Center for Public Integrity (CIP)

à l'AFP


Dans un rapport publié en octobre 2020, l’ONG mozambicaine Center for Public Integrity avait fait état d’abus sexuels dans un contexte humanitaire. Des dizaines de femmes déplacées à Cabo Delgado avaient signalé avoir été agressées par des chefs de communautés. Contacté par l'AFP, un représentant des autorités locales avait déclaré ne pas avoir connaissance de tels agissements.

La situation n'est pas nouvelle. Human Rights Watch rappelle qu’en 2019, des survivantes du cyclone Idai étaient forcées à avoir des relations sexuelles avec des chefs de communautés en échange de nourriture. Depuis, aucune enquête n’a été menée par les autorités pour mettre un terme à ces abus et punir les agresseurs.

Avec l'impunité qui perdure, des femmes vulnérables sont de nouveau harcelées et certaines préfèrent parfois se passer d’aides pour ne pas avoir à subir cette violence.

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