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Bénin : un modèle de démocratie "en péril" en Afrique de l'Ouest

Les Béninois ont du mal à y croire. Un parlement sans aucune voix dissidente s’apprête à s’installer dans leur pays, comme à l’époque du parti unique. L’opposition dénonce une "décapitation de la démocratie" et appelle la population à la résistance.

Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Un engin de la police patrouille à Cotonou, le 1er mai 2019. La ville reste placée sous haute surveillance en attendant l'installation de la nouvelle Assemblée nationale. (YANICK FOLLY / AFP)

Ils étaient une vingtaine sur les 83 députés de l’Assemblée nationale sortante à tenir tête au pouvoir exécutif. Le nouveau parlement béninois, qui va se mettre en place le 16 mai, ne compte aucune voix dissidente. Aucun parti de l’opposition n’a été autorisé à présenter des candidats aux élections législatives du 28 avril. Ils ne remplissaient pas toutes les conditions exigées par le nouveau code électoral. Résultat : seuls deux partis proches du pouvoir ont pris part à ce scrutin.

"Le Bénin revient à l’époque du parti unique et de la pensée unique. Nous sommes en train de retourner à une période malheureuse de l’histoire de notre pays. C’est une décapitation de notre démocratie. Nous résisterons. Et c’est ça le mot d’ordre", explique à franceinfo Afrique le député de l’opposition Guy Dossou Mitokpé, membre de la Commission des lois dans le parlement sortant.

Ils sont nombreux, au sein de l’opposition et de la société civile, à dénoncer "le virage inquiétant" que prend leur pays. "Nous allons nous lever pour dénoncer ce parlement illégal et illégitime. Nous ferons appel à tous les partenaires techniques et financiers de notre pays pour qu’ils sanctionnent ce pouvoir", clame Ernest Adjovi, Secrétaire général de l’ONG Bénin mains propres. Une organisation qui lutte contre la corruption.

Personne ne s'attendait à un tel "virage totalitaire"

Tous mettent en cause le président du Bénin, Patrice Talon, accusé de vouloir décapiter la démocratie dans leur pays. Le député Guy Dossou Mitokpe explique à franceinfo Afrique que les Béninois ont été littéralement stupéfaits. Personne ne s’attendait à ce qu’il prenne un tel virage, trois ans après son accession au pouvoir "On était loin de se douter qu’il allait prendre un virage de totalitarisme, d’autoritarisme, de despotisme. Le président pense qu’il doit être l’homme à tout diriger. Qu’il doit tout contrôler. Il a tout fait pour avoir la main sur toutes les institutions du pays. Il pense que la république doit pouvoir être dirigée comme une entreprise. Ce n’est pas possible parce qu’une nation, c’est l’acceptation des contre-pouvoirs. C’est l’acceptation des adversaires politiques", insiste-t-il.

Guy Dossou Mitokpé, député de l'opposition dans l'Assemblée nationale sortante. Il dénonce une parodie d'élections. (Photo/ Guy D.Mitokpé)

Au lendemain des élections controversées du 28 avril, l'église catholique béninoise a proposé sa médiation aux protagonistes de la crise. Son appel est resté lettre morte. Pour le pouvoir, ces élections ont été parfaitement règlementaires. Et gare à ceux qui tenteront de remettre en cause l'Etat et ses institutions, ont prévenu les autorités béninoises. Des menaces qui sont loin de refroidir ceux qui se préparent à la résistance.

Nous sortirons avec des étendards blancs pour dire que nous sommes pour la paix, mais que nous ne sommes pas pour la destruction programmée de notre démocratie

Guy Dossou, député de l'opposition béninoise

à franceinfo Afrique

Nous continuerons nos manifestations de protestation pacifiques, assure le député Guy Dossou Mitokpe. Pour lui, la démocratie acquise de haute lutte par les Béninois est une aubaine et un héritage à défendre à tout prix.

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