Gambie : 2 soldats sénégalais tués, 9 portés disparus, après une opération militaire contre le trafic de bois
Neuf soldats sénégalais de la mission ouest-africaine en Gambie sont portés disparus depuis lundi 24 janvier 2022. Ils seraient, selon Dakar, aux mains des rebelles casamançais du MFDC.
L’armée sénégalaise a annoncé la mort de deux de ses soldats dans l’ouest de la Gambie, à la frontière avec la Casamance. Neuf autres militaires sont portés disparus depuis le 24 janvier 2022.
"Accrochage avec des rebelles"
Un violent accrochage aurait opposé "les soldats de la mission ouest-africaine en Gambie (Ecomig) à des présumés rebelles casamançais lors d'une opération contre le trafic de bois", a affirmé un communiqué de l'armée sénégalaise. Les neuf militaires sénégalais "sont probablement détenus en otages par le MFDC", poursuit le communiqué.
Le MFDC est la rébellion armée qui se bat depuis bientôt 40 ans pour l'indépendance de la Casamance, région du sud du Sénégal frontalière de la Gambie. "Au cours des affrontements consécutifs à une vigoureuse action militaire, un rebelle a trouvé la mort et trois autres ont été faits prisonniers", indique l'armée sénégalaise. Ces affrontements avec les rebelles présumés sont survenus "dans le cadre d'une action de sécurisation et de lutte contre les trafics illicites, notamment contre l'exploitation criminelle du bois sur la frange frontalière avec la Gambie", précise le même communiqué.
"Durant les cinq derniers mois, 77 camions transportant illégalement du bois provenant du Sénégal ont été immobilisés par le détachement sénégalais déployé au sein de la Force internationale en Gambie."
Communiqué de l'armée sénégalaiseà l'AFP
La Mission de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest en Gambie (Ecomig) a été instituée suite la crise politique née du refus de l'ex-président gambien Yahya Jammeh de quitter le pouvoir après sa défaite à la présidentielle de décembre 2016. Le dictateur a finalement été forcé à l'exil en janvier 2017 par les pressions internationales et l'entrée de troupes sénégalaises sur le sol gambien.
La Gambie, haut lieu du trafic de bois
Selon une étude de l’Agence d’investigation environnementale (AIE) datant de 2019, la Gambie fonde une grande partie de son économie sur le commerce du bois. Rien qu’en 2017, ce bois représentait environ 50% de ses exportations.
Selon ce rapport contesté par les indépendantistes casamançais, la contrebande de bois de rose commence au Sénégal, où le Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC) abat les arbres et les vend illégalement à la Gambie voisine, afin de financer sa lutte pour l’indépendance (…)."Avec Jammeh comme allié et l’entreprise Westwood basée en Gambie comme facilitateur commercial, le MFDC a pu exercer un monopole sur le commerce de bois en Basse-Casamance en utilisant les profits issus de ce commerce pour financer sa lutte armée" est-il écrit dans le rapport de l’ONG Trial International
Des élus de Casamance et des écologistes dénoncent régulièrement l'implication de Gambiens dans le trafic de bois en Casamance souvent imputé aux rebelles du MFDC. Ce qui est avéré en revanche, c’est que le bois de rose, coupé illégalement en Casamance et exporté depuis la Gambie vers la Chine, était l'une des principales sources de financement de l'ancien dictateur gambien Yahya Jammeh.
Le trafic continue sous la présidence Barrow
De 2013 à 2017, la Gambie de Yahya Jammeh a exporté plus de 600 000 tonnes de bois de rose. C’est l’équivalent d’un million d’arbres expédiés en Chine dont la valeur est estimée à 300 millions de dollars, précise une enquête de la BBC.
L’élection en Gambie d’un nouveau président proche du pouvoir sénégalais avait suscité l’espoir de voir s'arrêter ce pillage à grande échelle. Il n’en a rien été. Les chiffres que la BBC s’est procurée montrent que les exportations de bois de rose depuis le territoire gambien vers la Chine se sont poursuivies depuis 2017 date de l’accession au pouvoir du nouveau président Adama Barrow.
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