Cet article date de plus de cinq ans.

Le parti Ennahdha présente un candidat à la présidentielle en Tunisie

Abdelfattah Mourou est vice-président par intérim de l'Assemblée des représentants du peuple, le Parlement tunisien. C'est la première fois de son histoire que le mouvement d'inspiration islamiste présente un candidat à ce scrutin 

Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Abdelfattah Mourou à Tunis le 25 juillet 2019 (FETHI BELAID / AFP)

Ennahdha, qui se définit lui-même comme un parti "musulman démocrate" et non "islamiste", sera représenté au scrutin du 15 septembre 2019 par son vice-président Abdelfattah Mourou, 71 ans, avocat de formation. Celui-ci remplace actuellement à la présidence du Parlement tunisien Mohamed Ennaceur, devenu chef de l'Etat par intérim après le décès, le 25 juillet, de Béji Caïd Essebsi.

Abdelfattah Mourou est l'un des membres fondateurs d'Ennahdha au côté de Rached Ghannouchi. Le mouvement a été fondé en 1981.

"Le Conseil consultatif du parti a voté à une majorité de 98 voix en faveur de la candidature d'Abdelfattah Mourou à l'élection présidentielle", a indiqué Ennahdha dans un communiqué publié le 7 août 2019. Apparemment, la décision a été difficile à prendre... 

"Nous ferons tout pour que Mourou accède au second tour", a déclaré le président d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, cité par le site de la radio Mosaïque FM"Le parti affirme, à travers la désignation de Mourou, sa confiance en nombre de valeurs telles que la démocratie, la République et la révolution tunisienne. Tous les partis doivent, naturellement, se concurrencer", a-t-il ajouté. 


Avant le décès du chef de l'Etat et le bouleversement du calendrier électoral, Ennahdha était réticent à l'idée de présenter son propre candidat à la présidentielle. Le mouvement misait sur un succès aux législatives, prévues avant, pour laquelle il voulait jouer les faiseurs de roi. Mais le premier tour de la présidentielle a été avancé au 15 septembre et les législatives sont prévues le 6 octobre.

"Oiseau rare" modéré...

"Jusqu’au début de la soirée du mardi (6 août), le parti semblait se diriger vers le soutien au chef du gouvernement Youssef Chahed mais dans les dernières heures de la soirée les choses ont évolué", raconte huffpostmaghreb.com. Il y avait urgence à deux jours de la clôture des candidatures. "La question était de savoir si Youssef Chahed était prêt à accepter nos conditions pour obtenir le soutien d’Ennahdha. Il n’a pas donné suite, alors certains ont décidé de changer de fusil de d’épaule et de, finalement, accepter un candidat issu du parti", a raconté au site un participant à la réunion. 

Initialement, le leader du mouvement, Rached Ghannouchi, était considéré comme le "candidat naturel" du parti. Mais les sondages ne lui étaient pas très favorables... Dès le 31 juillet, le site Tunis Webdo rapportait des propos d'Abdelfattah Mourou laissant entendre qu'il serait candidat.

Il est perçu comme "l'oiseau rare", selon l'expression de La Presse de Tunisie, que se cherchait le mouvement d'inspiration islamiste. "Policé, drôle et charmeur, il offre un profil plus avenant et, en tout cas, moins sulfureux que ceux d'autres dirigeants islamistes, souvent raides", observe kapitalis, qui ne semble guère apprécier les islamistes. 
Le président par intérim de l'ARP est "connu pour sa modération", rapporte l'AFP.

... ou "ambivalent" ?

Huffpostmaghreb évoque un personnage "sympathique, bon orateur et apprécié". Mais "ambivalent". Des détracteurs lui reprochent "d'avoir un double discours et d'afficher des positions contradictoires sur le rôle que l'islam doit tenir au sein de la société", explique France 24. Huffpostmaghreb rapporte qu'en 2012, il avait rencontré "le prédicateur extrémiste Wajdi Gonim" et "tenu des propos peu amènes sur la société tunisienne et sur les moyens de l'islamiser"Abdelfattah Mourou avait fait son mea culpa en février 2019, rappelle le site.

"Emprisonné sous Bourguiba, il avait condamné la violence choisie en 1991 par les islamistes", rapporte de son côté Marianne. En 2012, il avait été violemment agressé et légèrement blessé par un militant islamiste radical dans une mosquée à Béja (nord-ouest de la Tunisie), comme l'ont raconté l'AFP, cité par Le Figaro, et Jeune Afrique. Il avait également "été menacé de mort par des salafistes. Les prédicateurs saoudiens qui venaient voiler les petites filles tunisiennes étaient sa bête noire", poursuit Marianne.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.