Cet article date de plus de six ans.
RDC: le retour annoncé de Bemba suscite enthousiasme et inquiétude à Kinshasa
Pour certains Congolais, c’est le retour de l’homme providentiel à quelques mois de l’élection présidentielle de décembre prochain. Pour d’autres, l’irruption de l’ancien chef de guerre Jean-Pierre Bemba sur la scène politique congolaise, après onze années d’absence, pourrait replonger le pays dans le chaos. A Kinshasa, la nouvelle donne ne laisse personne indifférent.
Publié
Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Acquitté par la Cour pénale internationale de la Haye, l’ex-chef de guerre Jean-Pierre Bemba va faire son retour le 1er août à Kinshasa après onze années d’absence en RDC. Son parti, le Mouvement de Libération du Congo, l’a déjà investi candidat à la présidentielle du 23 décembre 2018 et prépare un accueil populaire pour son chef dans la capitale.
«Le MLC invite la population congolaise, particulièrement les Kinois et les Kinoises, à lui réserver un accueil chaleureux, dans la paix et l’allégresse», indique un communiqué signé par la secrétaire générale du parti, Eve Bazaiba.
Le retour de Jean-Pierre Bemba ne laisse personne indifférent dans son pays où la tension est perceptible à quelques mois de l’élection présidentielle.
«Le retour d’un messie»
Pour le journaliste et blogueur congolais Will Cleas Nlemvo, une grande partie de la population congolaise, épuisée par les 17 ans de règne de Kabila, attend l’arrivée de Bemba comme le retour d’un messie. Mais il fait remarquer que derrière cette image se cache un passé politique sulfureux.
Willy Cleas rappelle que l’élection présidentielle de 2006 s’était soldée par des affrontements violents à Kinshasa entre la milice de Jean-Pierre Bemba, candidat malheureux, et les troupes de son rival Joseph Kabila. Une guerre de trois jours qui avait fait de nombreux morts. Jean-Pierre Bemba avait dû quitter Kinshasa en 2007 sous escorte des Nations Unies. Il n’y a plus remis les pieds.
«Avec un tel passé sanglant, le retour de Jean-Pierre Bemba sur la scène politique congolaise enchante certes ceux qui souhaitent à tout prix le départ de Joseph Kabila. Mais il n’augure rien de bon», écrit-il.
Le risque d’une nouvelle explosion de violences
La même inquiétude est ressentie dans une analyse publiée par The Conversation. Le site observe que même si Jean-Pierre Bemba s’est éloigné de la scène politique congolaise pendant plusieurs années, son entrée possible dans la mêlée pourrait plonger le pays dans un nouveau désarroi.
«Si Kabila insiste pour se présenter à nouveau, ce qu’il n’est pas autorisé à faire sur le plan constitutionnel, la RDC pourrait être confrontée à une autre période d’incertitude croissante, et presque inévitablement plus violente», redoute The Conversation qui rappelle que Bemba s’est fait beaucoup d’ennemis sur la scène politique congolaise.
Jean-Pierre Bemba dans la tactique de Kabila?
A moins que Jean-Pierre Bemba ne fasse partie de la stratégie de Joseph Kabila pour se maintenir au pouvoir. C’est l’hypothèse avancée par notre confrère Christophe Rigaud d’Afrikarabia qui rappelle que la décision de renouveler le passeport diplomatique de Jean-Pierre Bemba a été décidée au plus haut niveau.
«Si Joseph Kabila n’a certainement, ni souhaité, ni prévu l’acquittement surprise de son plus féroce adversaire aux élections de 2006, le président congolais semble l’avoir intégré dans sa tactique et compte bien se servir du come-back du "chairman" sur la scène politique.»
Pour notre confrère, le retour de Jean-Pierre Bemba à Kinshasa peut permettre à Joseph Kabila «soit de reporter une nouvelle fois les élections en nommant le patron du MLC à la primature, soit l’utiliser pour diviser un peu l’opposition» qui se cherche toujours un candidat unique, capable de remporter la présidentielle fin décembre.
On devrait être fixé très rapidement sur l’agenda politique de l’ancien vice-président congolais. Sauf imprévu, Jean-Pierre Bemba doit fouler le sol congolais le 2 août. Il aura ensuite jusqu’au 8 août pour déposer sa candidature.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.