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RDC: des villageois découvrent plusieurs fosses communes près de Kananga
Le pouvoir congolais avait d’abord nié, en dénonçant un montage grossier de la vidéo qui a révélé sur les réseaux sociaux le massacre de civils sans défense par des éléments de l’armée. Kinshasa a finalement annoncé l’arrestation de sept militaires impliqués dans ce carnage. Autour du village meurtri de Tshimbulu, dans le centre du pays, huit fosses communes ont été découvertes par les rescapés.
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Dans l’une des huit fosses communes découvertes autour de Tshimbulu, près de Kananga, capitale de la province du Kasaï central, les villageois ont trouvé un bandeau rouge, porté par les combattants de la milice Kamuina Nsapu. Ils affirment que les ossements humains enterrés dans ces fosses appartiennent aux victimes de l’insurrection populaire déclenchée par la révolte d’un chef coutumier, abattu par l’armée gouvernementale.
«Des bras, des jambes et des cadavres entiers»
Une vidéo avait été postée en février sur les réseaux sociaux montrant des hommes en uniformes tirer sur des villageois non armés, puis insulter leurs victimes avant de les achever à bout portant. Leurs corps auraient été ensevelis dans ces fosses communes selon les témoignages des habitants recueillis par RFI et l’Agence Reuters.
«Ici nous sommes dans le cimetière creusé par les militaires, on ne sait pas combien de gens sont enterrés dedans», témoigne un habitant. Il raconte comment les villageois ont découvert une fosse de dix mètres sur cinq, mal recouverte. «On a vu des bras, des jambes et même des cadavres entiers, ils étaient mal enfouis», explique-t-il.
«Les militaires ont tenté de cacher les traces»
Selon les habitants, les militaires ont tenté, en vain, de cacher les traces de la répression qui s’est abattue sur leurs villages depuis le 3 janvier 2017. Mais les villageois ont pu suivre des traînées de sang jusqu’aux fosses communes cachées dans les hautes herbes.
«Partout ici, sur la route, il y avait du sang et de la matière blanche. Tout le monde qui passait par ici pouvait voir ça», raconte une villageoise. Une autre se souvient de la présence sur les lieux d’un camion suspect dans la nuit du 12 au 13 février. «Il est arrivé de Tshimbulu vers 20h et il est reparti vers 23h. Ce sont les militaires qui ont creusé ça», témoigne-t-elle.
Le lendemain, des riverains y ont découvert une fosse contenant des cadavres et un bandeau rouge, signe emblématique des miliciens Kamuina Nsapu qui se sont soulevés après l’exécution de leur chef.
Le pouvoir de Kinshasa a d’abord nié
Des hommes, des femmes et même des enfants font partie des victimes de cette répression sanglante attribuée à l’armée gouvernementale. Un massacre qualifié d’abord de «montage grossier» par le pouvoir de Kinshasa qui a ensuite décidé de mener des enquêtes face aux allégations persistantes de violation graves des droits de l’Homme dont se seraient rendus coupables des éléments de l’armée.
«Nous avons mis la main sur sept suspects, tous des militaires actuellement en détention, dont des officiers et des sous-officiers», a annoncé lors d’une conférence de presse, le général-major Joseph Ponde, auditeur général des Forces armées congolaises.
Les suspects sont poursuivis pour crimes de guerre par meurtre, mutilation, traitements cruels inhumains et dégradants. L’auditeur général de l’armée indique avoir sollicité la mission de l’ONU en RDC depuis le 25 février pour la suite de l’enquête.
400 morts depuis septembre 2016
Ces violences ont suscité une vive émotion à travers le monde. Le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme a dénoncé l’usage excessif et disproportionné de la force contre des civils. 400 exécutions sommaires auraient été perpétrées par des soldats depuis septembre 2016.
Les Etats-Unis, la France et l’Union européenne ont exprimé leur préoccupation et demandé une enquête indépendante pour identifier et punir les coupables.
Depuis septembre 2016, la région du Kasaï est le théâtre d’une rébellion qui a éclaté à la suite de la mort du chef coutumier Kamwina Nsapu exécuté lors d’une opération militaire. Il était entré en conflit avec le pouvoir central. Ses miliciens menaient des attaques contre les institutions et symboles étatiques.
La tension reste vive dans cette province où deux experts onusiens et leurs quatre accompagnateurs congolais ont été enlevés le 11 mars 2017. Depuis, ils sont portés disparus.
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