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Mixité: les supportrices algériennes restent à la porte des stades de foot

Aucune loi n'en interdit l'accès aux Algériennes, mais le stade de football est un territoire exclusivement masculin en Algérie. Jusque dans les années 1980, elles étaient pourtant nombreuses dans les gradins avec les hommes...
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Jusque dans les années 1980, les supportrices étaient nombreuses dans les gradins avec les hommes. (FAROUK BATICHE / AFP)

«Si les femmes veulent voir un match de foot, qu'elles aillent voir jouer les footballeuses et nous laissent entre nous», lance Sid Ali, un chômeur de 22 ans, approuvé par ses copains hilares, regroupés devant le stade de leur club préféré, l'USMA (Union sportive de la Médina d'Alger). «On a besoin de se défouler entre garçons», poursuit le jeune homme, coiffé d'une iroquoise décolorée, sous-entendant que la présence de femmes les mettrait mal à l'aise, notamment au moment de se joindre aux torrents d'insultes à caractère sexuel que s'échangent les supporteurs. Pour certains hommes, le stade de football en Algérie s'impose ainsi comme un ultime bastion de virilité à défendre.

Aucune loi n'en interdit l'accès aux femmes, mais le stade de football est un territoire exclusivement masculin en Algérie. Jusque dans les années 1980, elles étaient nombreuses dans les gradins avec les hommes. C'était «la belle époque», quand la mixité était la norme dans la société algérienne, se souvient Djahida, une esthéticienne sexagénaire. Les naissances successives de ses deux enfants ont éloigné des stades cette fan de football. Puis vinrent les années de guerre civile (1992-2002), durant lesquelles on évitait tout lieu public. Aujourd'hui, plus question pour Djahida d'y retourner: elle a peur d'être insultée voire agressée.

Le football passionne aussi de nombreuses Algériennes.  (FAROUK BATICHE / AFP)

Changer les mentalités
Le football passionne pourtant de nombreuses Algériennes, en témoignent toutes celles qui, lors des victoires de l'équipe nationale, sillonnent Alger assises aux portières des voitures, en groupe ou en famille. Elles assistent sans problème aux matches d'autres sports tels que le handball ou le basket. Mais «c'est un suicide» pour une femme d'aller à un match de foot, estime Samia Brahimi, une étudiante de 25 ans passionnée de ballon rond.

Largement cantonnées à l'espace privé durant des années de montée de l'islamisme et de guerre civile, les Algériennes ont ensuite reconquis partiellement l'espace public. En ville, les femmes et les adolescentes ont regagné la rue, abandonnée durant les «années noires», et se sont aussi appropriées des endroits jadis exclusivement masculins, tels que cafés ou restaurants.
        
Largement cantonnées à l'espace privé durant des années de montée de l'islamisme et de guerre civile, les Algériennes ont ensuite reconquis partiellement l'espace public (FAROUK BATICHE / AFP)

Présidente de l'Association de promotion du sport féminin, Dounia Hadjeb dénonce l'absence de volonté politique de changer cet état de fait. Dans les tribunes d'honneur, les responsables politiques et les dirigeants du football algérien ou de clubs ne viennent jamais avec leurs épouses et leurs filles, souligne-t-elle. Leur présence au stade ou celle des femmes des joueurs pourraient être une image forte et agir comme un «déclic», reconnaît Yamina Rahou, sociologue au Centre de recherches en anthropologie sociale et culturelle d'Oran.

Samia voudrait, elle, que les femmes s'organisent: en venant à une centaine, «on se fera moins embêter» au stade, assure-t-elle. En attendant, elle suit les matches à la télévision, à l'instar de Lamia et de son mari Lyes, des quadragénaires mordus de football qui ne conçoivent leur passion qu'en famille. 
 
Comme Lyes, de nombreux Algériens se privent de stade faute de pouvoir y emmener leur épouse et leurs enfants. «On ne peut pas aller en famille au stade», assure Lamia: «Comment expliquer à mon fils que des hommes (...) insultent sa mère dans des termes très vulgaires?

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