Soudan : des milliers de manifestants anti-putsch repoussés à coup de gaz lacrymogènes aux abords du palais présidentiel
La manifestation a lieu à Khartoum, la capitale. Redoutant un nouveau déchaînement de violence, le syndicat de médecins pro-démocratie a dit "demander au monde de surveiller ce qui va se passer".
Des violences ont éclaté à Khartoum, alors que les autorités avaient bloqué les télécommunications juste avant une manifestation d'ampleur contre le pouvoir militaire. Les forces de sécurité soudanaises tirent des grenades lacrymogènes pour repousser les milliers d'opposants qui s'approchent, samedi 25 décembre, du palais présidentiel. La foule, désormais à quelques dizaines de mètres du palais où siègent les autorités de transition chapeautées par le général Abdel Fattah Al-Burhane, auteur du coup d'Etat mené le 25 octobre, avance et recule au gré des charges policières.
A chacune d'elle, de nouveaux blessés sont évacués par des manifestants, a constaté un journaliste de l'AFP sur place. Des barrages de grenades lacrymogènes attendent également les protestataires qui tentent de traverser les ponts reliant ses banlieues à Khartoum.
En prévision de cette manifestation, dès les premières heures du jour, l'internet mobile avait été coupé, puis les communications téléphoniques n'ont plus fonctionné. "La liberté d'expression est un droit fondamental et cela inclut l'accès total à internet", a protesté l'émissaire de l'ONU, Volker Perthes, rappelant que "personne ne devrait être arrêté pour avoir eu l'intention de manifester", alors que les militants font état de rafles depuis vendredi soir dans leurs rangs.
Un Etat toujours sans gouvernement
Les manifestants, en nombre – des dizaines de milliers à Khartoum, dans ses banlieues, mais aussi à Madani, à 150 kilomètres au sud de la capitale, à Atbara (nord) et à Port-Soudan (est) –, conspuent l'armée, son chef, Burhane et même le Premier ministre civil, Abdallah Hamdok. Après le putsch militaire, ce dernier avait retrouvé son poste en acceptant de reconnaître l'état de fait post-putsch et donc la prolongation du mandat du général Burhane à la tête du pays pour deux ans. Le Soudan n'a toujours pas de gouvernement, ce qui bloque la reprise de l'aide internationale, vitale pour ce pays, l'un des plus pauvres au monde.
Redoutant un nouveau déchaînement de violence, le syndicat de médecins pro-démocratie qui recense les victimes de la répression depuis 2018 a dit "demander au monde de surveiller ce qui va se passer". Il y a moins d'une semaine, à l'occasion d'une manifestation organisée pour le troisième anniversaire du lancement de la "révolution" de 2018 qui força l'armée à mettre fin à 30 ans de dictature militaro-islamiste d'Omar El-Béchir, les forces de sécurité ont tiré à balles réelles et fait pleuvoir des grenades lacrymogènes sur les centaines de milliers de manifestants. Le lendemain, les forces de sécurité avaient dispersé à coups de bâtons les milliers de protestataires qui participaient à un "sit-in illimité", le mode opératoire de la "révolution" qui avait renversé Béchir, en 2019, devant le palais présidentiel.
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