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Déforestation de l'Amazonie : "Ce qui changerait la situation, c'est un investissement massif des pays développés", selon un géographe

"Il faudrait des dizaines de milliards de dollars", alerte François-Michel Le Tourneau pour changer la logique des "gens qui entretiennent la déforestation". 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Vue aérienne d'une partie de l'Amazonie déforestée au Brésil en août 2020.  (Florian PLAUCHEUR / AFP)

"Ce qui changerait la situation, c'est un investissement massif des pays développés" pour lutter contre la déforestation de la forêt amazonienne, a souligné jeudi 15 juillet un géograpphe sur franceinfo. François-Michel Le Tourneau réagissait à la publication par la revue Nature (en anglais) d'une étude qui explique que l'Amazonie absorbe désormais moins de CO2 qu'elle n'en produit. Selon le directeur de recherche au CNRS, "les quelques dizaines de millions proposées lors des aides d'urgence n'ont absolument aucune chance de changer" ce genre de processus dû au réchauffement climatique.

franceinfo : L'humanité risque-t-elle de disparaître d'ici la fin du siècle ?

François-Michel Le Tourneau : Les indicateurs sont inquiétants et les mauvaises nouvelles se multiplient. Néanmoins, l'humanité s'adapte beaucoup : je ne pense pas qu'elle va disparaître. La question est de savoir quel mode de vie va perdurer après 2100. Les changements auxquels nous allons devoir nous préparer sont immenses si on ne fait pas un peu plus attention à ce que nous faisons maintenant.

Comment une forêt peut-elle émettre du dioxyde de carbone, est-ce seulement dû à l'activité humaine ? S'agit-il d'une transformation soudaine ou aurions-nous pu le voir venir ?

La première chose, c'est que les plantes absorbent du CO2 jusqu'à leur limite de croissance. La forêt amazonienne est une forêt très ancienne et on n'était déjà pas très loin de cette limite. On avait pensé que la plus grande disponibilité de carbone dans l'atmosphère allait la doper mais comme les arbres sont déjà à leur limite de croissance, l'effet a été assez faible. On s'est donc aperçu que cette absorption diminuait au fur et à mesure du temps. La deuxième chose, c'est la déforestation : quand on dit que cette forêt émet du carbone, c'est en réalité que l'absorption du carbone par ce qui reste de forêt n'est plus suffisante pour compenser le carbone émis par la déforestation. Cela fait au moins une décennie que la capacité de l'Amazonie à absorber du carbone décline et ça fait très longtemps qu'on est au courant des processus en cours avec le changement climatique. Mais ce n'est qu'à partir du moment où ils deviennent catastrophiques que nous sommes capables de nous mobiliser pour y remédier.

Il y a une catastrophe bien visible, ce sont les derniers grands incendies de l'Amazonie en 2019, juste avant la crise sanitaire. Il y a eu une aide d'urgence internationale, un semblant de prise de conscience. Est-ce que ça a débouché sur quelque chose ?

Non. On n'est pas du tout sur des montants qui permettent de changer la situation. Ce qui changerait la situation en Amazonie, c'est un investissement massif des pays développés. La difficulté amazonienne, c'est que les gens qui entretiennent la déforestation sont des capitalistes qui comprennent bien leur intérêt financier. Pour changer cette dynamique-là, il faudrait des dizaines de milliards de dollars. Les quelques dizaines de millions proposées lors des aides d'urgence n'ont absolument aucune chance de changer ce phénomène-là. Si on propose plus d'argent aux propriétaires terriens qu'ils n'en auront en transformant la forêt en champs de soja, ils changeront leur mode de vie. Nous bénéficions de services environnementaux rendus pas la forêt, mais à quel point sommes-nous prêts à rémunérer ces services environnementaux ?

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