Primaires républicaines : Newt Gingrich s'avoue (enfin) vaincu
L'ancien président de la Chambre des représentants officialise son retrait de la course à l'investiture républicaine, après un an de campagne chaotique.
Newt Gingrich a fini par se rendre à l'évidence. Mercredi 2 mai, l'ancien président de la Chambre des représentants a annoncé qu'il mettait fin à sa campagne pour la nomination républicaine. "Enfin !", dirons certains, tant Gingrich a tardé à reconnaître sa défaite. Il faut dire qu'il pouvait prétendre à un destin plus glorieux : il y a un an presque jour pour jour, lorsqu'il annonce sa candidature, il est vu comme l'un des rivaux les plus sérieux de Mitt Romney. Las ! Passé d'homme providentiel à star des sondages, Newt Gingrich est redescendu de son podium aussi vite qu'il y était monté.
• Printemps 2011 : le retour de l’enfant prodigue
Début 2011, lorsque Newt Gingrich pointe son nez dans les médias, il revient de loin. L'homme a gagné ses galons de politicien dans les années 1990, lorsqu'il est devenu le chef de file de l'opposition au président Bill Clinton. Le triomphe des élections législatives de 1994, où le parti républicain prend le contrôle de la Chambre des représentants pour la première fois depuis 1954, est en grande partie à mettre à son crédit.
Mais le leader charismatique de la Chambre est depuis longtemps tombé de son piédestal : visé par plusieurs procédures pour manquement aux règle d'éthiques du Congrès, confronté à une fronde de son parti, Newt Gingrich a dû quitter, à regret, son siège en 1999. Il traverse les années 2000 dans l'ombre de la scène politique, poursuivant une lucrative carrière d'auteur et de consultant politique, dans les couloirs de Washington ou sur le plateau de la chaîne Fox News.
Pour lui, 2012 est l'occasion de faire son grand retour. Le parti républicain est en pleine introspection après la débâcle de 2008. Newt Gingrich, forte tête mais expérimenté, a à nouveau l'oreille du parti. Pour faire taire les réticences de l'aile la plus conservatrice du parti, le candidat joue l'humilité et fait amende honorable à la chaîne de télévision chrétienne CBN. Ses errances extraconjugales ? "En partie la conséquence de la passion qu'il éprouve pour son pays", explique-t-il face caméra.
Persuadé d'avoir sa carte à jouer, il annonce sa candidature le 11 mai 2011.
• Eté 2011 : le dilettante
Les débuts sont difficiles. Un mois à peine après sa déclaration officielle, une demi-douzaine de cadres de sa campagne démissionnent. Sous couvert d'anonymat, ils évoquent dans le New York Times le manque de concentration de leur candidat : en pleine campagne, il vient de s'octroyer avec sa femme une luxueuse croisière en Méditerranée, et se fait prier pour se jeter dans la bataille des première primaires, dans l'Iowa et le New Hampshire. Une attitude de dilettante qui conforte ses détracteurs.
De fait, le candidat assiste impuissant aux percées de ses rivaux, qui ont sur lui l'avantage de la nouveauté. D'abord Rick Perry, le gouverneur du Texas, chouchou des chrétiens conservateurs, puis l'iconoclaste Herman Cain, qui fait sensation avant d'être emporté par le scandale lié à plusieurs accusations de harcèlement sexuel.
• Hiver 2011 : le challenger roi
Mais Newt Gingrich tient bon, et exploite ses atouts : son talent pour les joutes verbales fait merveille dans les débats, où il mouche souvent le favori Mitt Romney, comme à Des Moines, dans l'Iowa, mi-décembre.
Son heure de gloire arrive avec l'hiver. Alors que les autres challengers de Mitt Romney mordent un à un la poussière, Newt Gingrich est propulsé en tête des sondages compilés chaque jour par RealClearPolitics.
L'entourage de Romney sent venir le danger, et concentre tous ses feux sur Gingrich à l'approche du caucus de l'Iowa, qui ouvre la saison des primaires le 3 janvier. L'offensive porte ses fruits : l'Iowa et le New Hampshire ne réussissent pas à Gingrich, éclipsé par la nouvelle gloire montante, Rick Santorum. Il lui faut attendre la Caroline du Sud, où il triomphe le 21 janvier, pour donner la pleine mesure de son potentiel.
• Début 2012 : la déconvenue
Gingrich peine cependant à capitaliser sur cette victoire. S'il fait merveille sur les plateaux télé, le candidat ne parvient pas à tenir la distance au cours des semaines qui suivent. Lorsque le candidat fait la une des journaux, c'est pour ses positions iconoclastes sur la conquête spatiale : il promet une base permanente sur la Lune et l'arrivée sur Mars "aussi rapidement que possible". Il devient la risée de ses rivaux.
Le 6 mars, lors du "Super Tuesday", ses scores décevants dans les Etats conservateurs du Sud, censés lui être favorables, signent pour les observateurs le début de la fin de sa campagne. Rick Santorum, qui l'a depuis longtemps doublé, l'appelle à demi-mot à jeter l'éponge. Même son principal soutien financier, le magnat des casinos Sheldon Adelson, qui a injecté des millions de dollars dans sa campagne, le dit alors "en bout de course", et au bord de la ruine.
• Mars-avril 2012 : le baroud d'honneur
Mais le candidat n'en fait qu'à sa tête et refuse de se retirer. Dans la presse, les commentaires sur Newt Gingrich se font moqueurs.
Le candidat se spécialise dans les déplacements de campagne loufoques, comme les visites de zoos, qu'il semble particulièrement affectionner. Newt Gingrich s'amuse lui-même, sur Twitter, d'un portfolio de BuzzFeed le représentant en compagnie des animaux les plus exotiques.
Les cinq primaires du 24 avril, où son score est inférieur à celui de Rick Santorum (qui a pourtant déjà annoncé son retrait !), sonnent le glas de sa campagne. Le 28 avril, quatre jours avant l'annonce de son retrait, Barack Obama lui-même se permet de taquiner le républicain au dîner des correspondants de la presse de la Maison Blanche : "Newt, il est encore temps, mec !" lance-t-il à la foule hilare (voir la vidéo de son discours sur le site de Politico). Assis parmi les convives, Newt Gingrich fait contre mauvaise fortune bon cœur. Mais rit sans doute un peu jaune.
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