Reportage "On veut que la population haïtienne cesse de souffir" : le déploiement de la force multinationale attendu avec espoir par les Haïtiens

Haïti attend toujours l'arrivée d'un premier contingent de la force multinationale menée par le Kenya. Sa mission : sécuriser le pays et briser les gangs.
Article rédigé par franceinfo
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Un camp de réfugiés à Bas Delmas. En raison des actions incessantes des gangs armés, de nombreux habitants ont été contraints de fuir avec leurs familles à Port-au-Prince, en Haïti. le 2 mai 2024. (GUERINAULT LOUIS / ANADOLU)

Le président kényan William Ruto a exprimé vendredi 31 mai sa confiance quant au déploiement prochain de policiers kényans dans le cadre d'une mission soutenue par l'ONU en Haïti. Ce petit pays des Caraïbes de 11 millions d’habitants est en proie à la violence et la loi des gangs. L’aéroport de Port-au-Prince, fermé depuis trois mois, a repris timidement du service. Un nouveau Premier ministre vient d'être nommé pour tenter de restaurer l'ordre alors que les attaques coordonnées contre la police, les institutions et les civils se poursuivent.

Une des dernières attaques a eu lieu dimanche 2 juin au matin, dans le centre-ville de Port-au-Prince. Le raid a duré plus de deux heures, mené par le gang de Bel Air. Gédéon est un habitant de ce quartier transformé en champ de bataille. "Nous sommes fatigués. Il y a des blessés. Beaucoup de tirs. Les bandits ont pillé des choses qui appartenaient à la population, tout volé", témoigne-t-il. Pendant qu'il se confie à franceinfo, des tirs retentissent. Qui tire ? "Je ne sais pas, la police ou des bandits, je ne sais pas. C'est Haïti", répond Gédéon, résigné.

Conditions de vie "catastrophiques"

Ces attaques coordonnées ont débuté à la fin du mois de février, ce qui a provoqué l'exode de milliers d'habitants qui ont trouvé refuge dans des gymnases ou dans des écoles, comme l'école Caroline-Cheveau qui abrite, dans des conditions catastrophiques, 420 familles. Parmi elles, celle de Stanley : "Le 29 février, nous avons été attaqués par des bandits armés avec des tirs nourris. C'était la guerre totale, jusqu'à ce que l'on arrive ici à l'école. Mais nous n'avons pas accès à la nourriture, c'est l'insalubrité la plus totale", raconte Stanley.

Les Haïtiens sont à bout de forces, mais avec la perspective du déploiement de la mission multinationale sous l'égide des Nations unies, la peur pourrait changer de camp. Elle pourrait permettre à la police haïtienne de reprendre le contrôle du pays. C'est en tout cas ce que pense ce policier qui a tenu à garde l'anonymat.

"La force va nous être utile. La police nationale d'Haïti est affaiblie. Si nous avons une force qui peut nous aider, oui je l'attends en tant que policier parce qu'on veut que la population haïtienne cesse de souffir."

Un policier haïtien

à franceinfo

Si le déploiement de cette force multinationale est une lueur d'espoir pour une grande partie de la population et la police haïtienne, elle inquiète en revanche les gangs et leur chef Jimmy Cherizier, alias Barbecue, à la tête d'une coalition appelée "Vivre ensemble" et composée des principaux groupes armés du pays. Un chef qui appelle au dialogue. "Les jours s'annoncent tristes pour le pays. Bien sûr qu'il y aura un bain de sang. Je dis à la communauté internationale de donner une chance à Haïti. On peut résoudre ce problème par le dialogue".

Espérée la semaine dernière, le premier contingent de cette force multinationale se fait toujours attendre. La base militaire censée l'accueillir est en cours de construction.

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