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Tous les clips sont permis aux primaires américaines

Détournement, provocation, vieilles rengaines à la gloire du pays... Les prétendants à l'investiture du parti conservateur pour la présidentielle de 2012 ne se privent d'aucune arme dans leurs spots de campagne.

Article rédigé par Marion Solletty
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le candidat aux primaires républicaines Mitt Romney à Manchester, dans le New Hampshire (Etats-unis), le 18 novembre 2011. (BRIAN SNYDER / REUTERS)

"Si nous continuons à parler de l'économie, nous allons perdre." La citation, sortie de la bouche de Barack Obama en 2008, sert d'accroche au premier spot télévisé de campagne du candidat aux primaires républicaines américaines Mitt Romney, diffusé lundi 21 novembre. (La citation se situe à 0'19" dans la vidéo.)

Sauf que cette phrase choc a en réalité été prononcée à l'origine par John McCain, le candidat républicain à la présidentielle de 2008. Si Barack Obama l'a reprise, c'était pour s'en moquer. Mais tant pis pour ceux qui crient à l'imposture, la fin justifie les moyens. Alors que les primaires approchent, les huit républicains candidats à l'investiture de leur parti pour la présidentielle de 2012 doivent décrédibiliser l'administration sortante tout en se démarquant de la concurrence. Petit passage en revue de leurs armes télévisuelles.

• Le recours à la mauvaise foi

Le procédé, poussé à son paroxysme dans le clip de Mitt Romney, n'est cependant pas nouveau. Sortir des citations de leur contexte constitue un moyen largement utilisé dans les spots de campagne.

Rick Perry, autre candidat aux primaires républicaines, y a eu recours le 16 novembre dans sa vidéo sobrement intitulée Lazy (paresseux, en français). Quelques jours plus tôt, le 12 novembre, Barack Obama participait au sommet de la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique, à Honolulu. Dans une discussion avec James McNerney, le PDG de Boeing, le président américain, s'adressant aux industriels, explique : "Nous avons été un peu paresseux, je pense, ces vingt dernières années. Nous avons en quelque sorte tenu pour acquis [que] les gens voudraient venir ici." Le président se réfère là à l'installation d'entreprises étrangères aux Etats-Unis.

Dans le clip de Rick Perry, la citation, qui introduit la vidéo, est tronquée pour devenir :"Nous avons été un peu paresseux, je pense, ces vingt dernières années", ce qui laisse entendre que Barack Obama traite tous les Américains de fainéants. Un commentaire pas vraiment bienvenu alors que 14 millions de personnes sont au chômage dans le pays.


• La carte du patriotisme 

Autre procédé classique : la référence aux valeurs fondatrices des Etats-Unis, bafouées, selon les républicains, par l'administration Obama. Images apocalyptiques d'un pays en ruines d'un côté, flamme vibrante de la statue de la Liberté de l'autre, Rick Perry en appelle au "grand pays" que sont les Etats-Unis, "dernier grand espoir de l'humanité", sur fond de musique digne des plus gros blockbusters hollywoodiens.

 

Si la forme se révèle beaucoup plus sobre, le message est similaire chez Michèle Bachmann, candidate ultraconservatrice du Tea Party et partisane d'une intervention minimale de l'Etat. "Ce dont nous avons besoin, ce sont des solutions basées sur l'économie de marché", affirme-t-elle dans un spot diffusé le 31 octobre. Et d'en appeler au libéralisme grâce auquel a prospéré la première économie modiale.

 

• L'art de l'ambiguïté

Pour faire la différence, d'autres misent sur des images aussi provocatrices qu'énigmatiques. A l'instar d'Herman Cain qui, avant de se trouver empêtré dans une affaire de harcèlement sexuel, avait beaucoup fait parler de lui grâce à un clip mettant en scène son directeur de campagne, Mark Block. Sur les dernières images, celui-ci est filmé pendant quelques secondes en gros plan, tirant avec un plaisir assumé sur sa cigarette.

 

Ce geste constitue presque un acte de rébellion aux Etats-Unis, où le tabagisme est soumis à des lois très restrictives et n'a pas bonne image. Le spot a laissé perplexe les journalistes politiques, qui n'ont cessé de questionner le candidat sur ce choix, à l'image de Bob Schieffer, présentateur de l'émission politique de CBS "Face the Nation" (Face à la nation). Le 30 octobre, il l'interroge sur le message caché derrière ce clip. Mais l'intéressé reste évasif : "Mark Block fume. C'est tout ce que dit ce clip." Tout juste met-il ces images en relation avec un thème de sa campagne "Herman est Herman". Comprenez : "Laissez les gens être eux-mêmes." Résultat : 1,6 million de vues sur YouTube. L'ambiguité fait recette.

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