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Asie du Sud-Est : ce que l'on sait de l'afflux de migrants en mer

L'Indonésie et la Malaisie ont annoncé l'accueil temporaire de 7 000 migrants. Les deux pays refoulent les bateaux qui se rapprochent de leurs côtes depuis plusieurs semaines. 

Article rédigé par Jéromine Santo-Gammaire
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Des migrants Rohingyas sont transportés vers leur nouvel abri temporaire, le 13 mai 2015, à Aceh, en Indonésie. (JANUAR / ANADOLU AGENCY / AFP)

Les bateaux de migrants ne seront plus refoulés. La Malaisie et l'Indonésie l'ont annoncé mercredi 20 mai alors qu'au même moment, des centaines de migrants étaient secourus en mer par des pêcheurs indonésiens. En proie à la pression internationale, les deux pays se sont dit prêts à fournir aux migrants un refuge provisoire sous certaines conditions.

Depuis plusieurs semaines, ces pays connaissent un afflux de migrants. Abandonnés par leurs passeurs, ceux-ci errent sur l'eau, sans eau ni nourriture, en attendant d'improbables secours, ou tentent de rejoindre la terre ferme à la nage. Francetv info vous explique ce que l'on sait de cet afflux de migrants qui rappelle à certains égards la situation en Méditerranée. 

D'où viennent-ils ?

La plupart sont originaires du Bangladesh ou de Birmanie et tentent d'échapper aux persécutions et à la misère. Beaucoup sont des Rohingyas, une minorité birmane considérée par l'ONU comme l'une des plus persécutées de la planète. La Birmanie, à majorité bouddhiste, a privé la plupart des ressortissants de la minorité musulmane de toute citoyenneté et les traite comme des migrants illégaux venus du Bangladesh. Depuis 2012, les violences interethniques meurtrières ont contraint des dizaines de milliers de Rohingyas à fuir le pays.

Les migrants en provenance du Bangladesh s'échappent d'un pays pauvre et politiquement instable, miné par la corruption. Nombre d'entre eux expliquent leur départ par les menaces et la violence politique qui pèsent sur eux.

Pourquoi un afflux soudain par les côtes ?

Leur objectif : la Malaisie. Le pays à majorité musulmane est l'un des plus prospères d'Asie du Sud-Est. Pour y accéder, les passeurs avaient pris l'habitude de conduire les migrants à travers la Thaïlande, pour ensuite regagner clandestinement leur destination par la terre ferme. Depuis plusieurs années, la Thaïlande est accusée de jouer le jeu des passeurs, aidés par la corruption de politiciens locaux, de policiers ou de militaires. Le nouveau Premier ministre, issu de la junte, au pouvoir depuis un an, a promis de s'atteler au problème du trafic humain.

Mais, au début du mois, les autorités thaïlandaises ont découvert des fosses communes dans les camps de transit de migrants à la frontière de la Malaisie, comme l'explique le correspondant du Monde dans la région. La trentaine de corps retrouvés appartiendrait aux migrants qui n'auraient pas survécu aux conditions de détention imposées par les passeurs en attente d'une somme d'argent supplémentaire pour poursuivre le voyage.

Une découverte macabre qui aura poussé les autorités thaïlandaises à sévir contre les filières de trafic humain. Et contraint les passeurs à trouver d'autres routes. La Thaïlande a convoqué, le 29 mai, un "sommet d'urgence" avec une quinzaine de pays concernés, au premier chef la Malaisie, l'Indonésie, la Birmanie et le Bangladesh, mais aussi les Etats-Unis et l'Australie. 

Qu'est-ce qui a poussé les pays à réagir?

La Thaïlande, l'Indonésie et la Malaisie ont ces dernières semaines refoulé quantité d'autres navires, choquant les Nations unies et des organisations non gouvernementales, qui les ont pressés de trouver une solution. 

Ces derniers jours, les trois pays ont accueilli quelque 3 000 naufragés. Ce sont des habitants, en l'occurrence des pêcheurs indonésiens, qui ont recueilli mercredi 20 mai 433 migrants. "Nous devons aider nos frères musulmans. Comment pouvons-nous ne pas aider des gens dans un tel dénuement ? Ce serait un grand péché", s'est exclamé un pêcheur indonésien. A Langsa, dans le nord de Sumatra, en Indonésie, les habitants ont distribué de la nourriture et des vêtements dans un refuge de migrants. 


En Indonésie, les habitants affluent pour aider... par lemondefr

A quoi se sont engagés les deux pays ?

La Malaisie et l'Indonésie ont ainsi annoncé qu'elles offriraient un accueil temporaire à 7 000 migrants, et pas plus, en attente de leur rapatriement ou d'une relocalisation, qui devront survenir dans l'année. "Le remorquage et le refoulement [des bateaux] ne vont [plus] se produire", a déclaré le ministre des Affaires étrangères malaisien après un entretien avec son homologue indonésien. 

D'après la Malaisie, environ 7 000 migrants dériveraient encore en mer. "Il appartiendra à la communauté internationale d'apporter à la Malaisie, à l'Indonésie et à la Thaïlande, le soutien, notamment financier, nécessaire à cet asile provisoire et à l'aide humanitaire aux migrants actuellement menacés", précise le communiqué commun.

Pour l'heure, la Thaïlande ne s'est pas associée à la décision de ses deux pays voisins. Mercredi, la Birmanie, discrète depuis le début de la crise, a finalement offert "une assistance humanitaire à tous ceux qui ont souffert dans la mer".

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