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Au Pakistan, la minorité sikhe victime de persécutions grandissantes

Plus minoritaire encore que les chrétiens, les hindous ou les chiites du Pakistan, la communauté sikhe souffre elle aussi d'une insécurité croissante dans un pays aux prises avec un islam de plus en plus radical. Depuis septembre 2014, des assassinats ciblés ont tué des commerçants sikhs dans le nord-ouest. Il n'y a eu ni revendication ni arrestation. Mais la paranoïa s'est installée.
Article rédigé par Véronique le Jeune
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Les pèlerins sikhs ont afflué du monde entier mi-avril 2015 dans une petite ville du nord du Pakistan considérée comme un lieu saint du sikhisme. (Muhammad Reza / ANADOLU AGENCY)

«Nous sommes pakistanais, nous habitons ici. Alors pourquoi est-ce que ça nous arrive? Nous sommes bouleversés par cette brutalité», soupire un vieil homme dans l'un des bazars de Peshawar, le grand carrefour du nord-ouest du pays où les Sikhs se sont regroupés et où leurs commerces ont fleuri dans un univers presque entièrement musulman.

Les Sikhs, souvent reconnaissables à leurs turbans et à leurs barbes non taillées, sont généralement associés à l'Inde, et plus précisément à la province du Penjab. Après la partition des Indes britanniques en 1947, la majorité des Sikhs vivant dans le nouveau Pakistan musulman sont d'ailleurs rentrés en Inde, mais d'autres sont restés au pays des purs, la signification du mot Pakistan en langue ourdoue.

Aujourd'hui, le pays compte environ 20.000 Sikhs qui vivent principalement près de la frontière afghane, une région régulièrement endeuillée par des attentats perpétrés par des insurgés talibans. Jusqu'à présent étaient visées les minorités chiite, chrétienne, hindoue et ahmadie (une branche persécutée de l'islam), épargnant les Sikhs. Mais cette tranquillité d'esprit s'est rompue depuis que des commerçants sikhs ont été tués par balle à l'automne 2014.

Il y a des «gens ne veulent voir aucune minorité se développer»

Pour Rabia Mehmood, spécialiste des minorités religieuses au centre de recherche Jinnah Institute d'Islamabad, les Sikhs ont rejoint malgré eux «le groupe de ceux qui sont ciblés» par les extrémistes, aux côtés des chrétiens, des chiites et autres.

Au cours de la dernière décennie, les opérations militaires dans les fiefs talibans du nord-ouest ont forcé la migration de millions de personnes incluant des Sikhs qui se sont réinstallés en ville, où ils ne passent pas inaperçus avec leurs turbans uniques, parfois de couleur vive, ce qui les rend plus vulnérables, selon Mme Mehmood. «Ils ne sauront jamais vraiment pourquoi ils sont visés, à part pour le fait (...) que la situation sécuritaire est mauvaise, et que des gens ne veulent voir aucune minorité se développer», précise-t-elle.


Mi-avril, avait lieu à Hasan Abdal, considéré comme un lieu saint du sikhisme à une cinquantaine de kilomètres au nord d'Islamabad, le pèlerinage annuel au gurdwara, le temple où Guru Nanak, le fondateur de la religion sikhe il ya cinq siècles, aurait laissé une empreinte de sa main. L'édifice magnifié d'arches et de dômes a reçu 5.000 pèlerins venus du monde entier, en particulier d'Inde, du Royaume-Uni et du Moyen-Orient.

Malgré la présence d'un miller de policiers, les Sikhs pakistanais disaient ne plus se sentir en paix et s'interroger sur leur avenir en République islamique du Pakistan.

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