Pakistan: menacé de destitution, Musharraf démissionne
"Après avoir considéré la situation et consulté divers conseillers en droit et alliés politiques, sur leurs conseils, j'ai décidé de démissionner", a déclaré le chef de l'Etat dans un discours télévisé à la nation. Comme Richard M. Nixon en août 1974, Pervez Musharraf aura préféré démissionner avant d'être destitué. Et comme le président américain, le leader pakistanais était au sommet de son impopularité.
L'ancien membre des commandos d'élite, arrivé à la tête de la seule puissance nucléaire militaire avérée du monde musulman en octobre 1999, à la faveur d'un putsch sans effusion de sang, a finalement cédé face à ses adversaires politiques. Les soutiens se sont bien gardés de se manifester pour lui venir en aide : ni l'armée, ni surtout les Etats-Unis, ne sont intervenus. Ces derniers temps, les rapports s'étaient refroidis avec l'administration Bush, qui reprochait à allié-clé dans la "guerre contre le terrorisme" islamiste de ne pas lutter assez efficacement contre la présence d'Al-Qaïda et des Taliban dans les zones tribales du nord-ouest du pays.
Dans son allocution télévisée, le général Musharraf a défendu bec et ongles son bilan et a accusé la coalition gouvernementale, sortie vainqueur des législatives de février, de saper les fondements de la République Islamique du Pakistan. Le gouvernement avait annoncé hier qu'il déposerait en début de semaine devant le Parlement une motion visant à engager une procédure de destitution contre le chef de l'Etat, qui avait démissionné du poste de chef d'état-major des armées avant les élections. Des élections remportées par le parti de l'ancien chef du gouvernement Nawaz Sharif, évincé du pouvoir en 1999 lors du putsch de Musharraf.
Ce parti et celui de l'ex-Premier ministre Benazir Bhutto, assassinée fin décembre dans un attentat-suicide, avaient formé un gouvernement de coalition en mars. Un bras de fer s'était ensuite ouvertement engagé au sommet de l'Etat, avec le président Musharraf. Ils lui reprochaient l'instauration de l'état d'urgence en novembre dernier et l'éviction de magistrats qui s'apprêtaient à statuer sur sa réélection contestée en octobre 2007.
Jusqu'au dernier moment pourtant, Pervez Musharraf avait fait savoir qu'il n'avait nullement l'intention de lâcher le pouvoir.
Anne Jocteur Monrozier, avec agences
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