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"Ce ne sont plus des manifestations, c’est un champ de bataille" : en Birmanie, les opposants au coup d'État militaire se cachent dans les zones frontières

Pour organiser la résistance contre le coup d'État militaire et fuir la répression de l'armée, des leaders du mouvement de désobéissance civile se réfugient désormais dans les zones frontières. Reportage à Mae Sot en Thaïlande, à la frontière birmane.

Article rédigé par franceinfo - Carol Isoux. Edité par Thomas Destelle
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Une photo anonyme lors d'une manifestation contre le coup d'État militaire dans le canton de Thaketa à Yangon. (HANDOUT / FACEBOOK / AFP)

Depuis le coup d’État militaire du 1er février, la Birmanie est toujours plongée dans une situation de guerre civile avec plus de 400 morts, dont au moins une dizaine d’enfants. Dans la matinée du lundi 29 mars, des bombardements ont eu lieu à la frontière thaïlandaise. De plus en plus de leaders du mouvement de désobéissance civile se cachent désormais dans les zones frontières pour organiser la résistance.

Au fond d’un restaurant discret, chemise et lunettes d’étudiant, Saw Jay regarde nerveusement par-dessus son épaule. Il y a près de trois semaines, ce jeune politicien et directeur d’une ONG birmane a passé illégalement la frontière thaïlandaise.
Après l’arrestation et la disparition de plusieurs de ses collègues, il a décidé de quitter le pays pour rester en vie et continuer à se battre. "Je ne voulais pas quitter mon pays, parce qu’on a besoin de gens sur le terrain, regrette Saw Jay. Mais les militaires ont commencé par s’attaquer aux députés du Parlement, de La Ligue pour la Démocratie, puis petit à petit, ils se sont rapprochés de nous, les plus jeunes, la prochaine génération de leaders. Je participais bien sûr aux manifestations, comme renfort, et ils se sont mis à viser précisément les gens qui restaient à l’arrière. Ce ne sont plus des manifestations aujourd’hui, c’est un champ de bataille."

"La police m’a appelé pour me menacer, je me suis dit qu’il était peut être temps de partir."

Saw Jay

à franceinfo

Récolter des fonds, trouver un moyen de les transférer alors que les banques sont fermées, décider de la stratégie à suivre... Saw Jay n’est pas le seul à avoir choisi de quitter Rangoun. Des milliers de leaders du mouvement de désobéissance civile sont aujourd’hui sous la protection des groupes armés des minorités ethniques.

Tout particulièrement chez les Karens, une ethnie à cheval entre la Thailande et la Birmanie. Selon Pdoh hman hman, porte-parole des autorités karens, nourrir et protéger ces fugitifs demandent d’importantes ressources dans des zones déjà sous tension : "Nous abritons de nombreux députés, des fonctionnaires en grève, mais il y a aussi des soldats déserteurs et des policiers. Ceux-là ne sont vraiment pas en sécurité. On essaie de fournir un abri, des moyens de communication, un endroit d’où ils puissent travailler."

Désormais ces groupes armés rebelles jouent un rôle essentiel dans la lutte contre la junte, des appels à l’unité entre différentes factions et la résistance des grandes villes inondent les réseaux sociaux. En échange, les leaders ethniques attendent des garanties sur une nouvelle Constitution qui offrirait à leurs États plus d’autonomie et de contrôle, notamment sur les ressources naturelles.

Birmanie : la résistance s'organise - Reportage de Carol Isoux

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