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Brésil : rencontre avec ceux qui veulent voir tomber Dilma Rousseff

Les heures de Dilma Rousseff au pouvoir sont comptées. Dans la soirée, les députés se prononceront sur l’éventuelle destitution de la présidente du Brésil. Un processus qui devra être approuvé par le Sénat. A la tête de la contestation, les Paulistanos, les habitants de São Paulo. Alice Serrano, l'envoyée spéciale de France Info, est allée à la rencontre de ces manifestants anti-Dilma.
Article rédigé par Alice Serrano
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Andréa manifeste contre Dilma Roussef et veut obtenir justice © RF/ Alice Serrano)

Il est 20h00 sur l’avenue Paulista, la principale artère de São Paulo. Des manifestants, un drapeau brésilien sur le dos, vont à la rencontre des automobilistes en tapant sur des casseroles en signe de protestation contre Dilma Rousseff. Les voitures approuvent en klaxonnant. Andréa lui est positionné au feu rouge. Les bras au-dessus de la tête, il tient une pancarte jaune sur laquelle se dégagent 7 lettres "JUSTIÇA" : "Justice ! Le Brésil veut plus de justice ! On en a assez de la corruption, des mensonges. Nos hommes politiques sont corrompus, la population n’en peut plus !"

Brésil : avec ceux veulent voir tomber Dilma Rousseff. Un reportage d'Alice Serrano

Habillé en jaune et vert, couleurs du Brésil, Andréa manifeste depuis trois semaines. Cet agent de voyage de 47 ans dénonce la corruption qui gangrène selon lui le Brésil jusqu’à la société qui l'emploie. Lui qui subit de plein fouet la crise, assure que la classe moyenne s’est appauvrie avec Dilma : "Le Parti des travailleurs est un parti de dilettantes ! Il distribue des allocations familiales aux assistés. Je vois plein de femmes qui ne travaillent pas pour en bénéficier ! Allons, allons !"

 

  ("Au revoir chérie" sur l'une des tentes des anti-Dilma © RF/ Alice Serrano)

"Fora Dilma !" (Dilma dégage), "Tchau querida !" (au revoir chérie) : voilà ce que l’on peut lire sur les tentes de ces manifestants qui ne se réclament d’aucun parti et campent ici depuis un mois maintenant. Ils sont une quarantaine au pied du bâtiment de la FIESPE, la principale organisation patronale brésilienne, ouvertement opposée à Dilma et qui leur fournit gracieusement l’électricité. Les manifestants ont improvisé une cuisine sur le trottoir. On y trouve des gâteaux et des bouteilles d’eau : "Ce sont des passants qui nous apportent à manger et à boire en signe de soutien". 

 

Isabella gère les vivres avec Alessandro. Ce cheminot aux longs cheveux noirs a le visage froissé par un mois de nuits passées sous la tente. Lui aussi souhaite la démission de Dilma. Mais soutient-il pour autant Michel Temer, son vice-président et plus vif opposant ? : "Non parce qu’il a lui aussi des ennuis avec la justice. Je veux des hommes politiques nouveaux, qui ne sont pas corrompus. D’ailleurs on restera ici jusqu’à ce que Temer lui aussi parte !" 

 

  (Isabella, une militante anti-Dilma de 19 ans, est favorable à une  intervention militaire après la destitution © RF/ Alice Serrano)

Isabella, elle, prône une solution plus radicale, une solution qui fait des émules depuis quelques temps au Brésil : "Après la destitution de Dilma, il faudrait entreprendre un grand nettoyage au Parlement et dans la classe politique…Et ça, les militaires sont les mieux placés pour le faire !"

 

Des paroles à peine croyable dans la bouche de cette jeune fille frêle de 19 ans. Licenciée il y a peu, Isabella crie son désespoir d’une classe moyenne touchée par la crise. Plutôt conservatrice, comme Alessandro ou Andréa, Isabella se dit catholique, opposée à l’avortement et au mariage homosexuel.

Le départ de Dilma, il n’y a pas que ces campeurs qui le souhaitent. C’est la volonté de la majorité de la population ici, comme Paulo, que l’on retrouve à deux pas de là dans le magasin de chaussures dont il est le gérant. La présidente brésilienne a, selon lui, appauvri le pays. "Les Brésiliens ne veulent pas dépenser leur argent car ils n’ont pas confiance en Dilma. On a beaucoup moins de clients depuis deux ans. On a été obligé de licencier du personnel, en tout 10 personnes."

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