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"Ils devaient partir, cette terre, c'est à nous" : dans le Haut-Karabakh, des Azerbaïdjanais reviennent s'installer dans les zones désertées par les Arméniens

Un peu plus d'un mois après l'offensive éclair de Bakou dans le Haut-Karabakh, des Azerbaïdjanais retrouvent "leurs terres", désertées de la population arménienne.
Article rédigé par Marie-Pierre Vérot
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
La famille de Leyla est revenue dans le Haut-Karabakh fin septembre-début octobre 2023. (MARIE-PIERRE VEROT / RADIOFRANCE)

Au dernier poste azerbaïdjanais avant l'Arménie, dans le corridor de Latchine, des ouvriers s'affairent. "Ici, il y a des chantiers un peu partout. On est en train de construire un nouveau territoire pour que les gens reviennent y habiter", explique l'un d'eux. Un peu plus d’un mois après la victoire des troupes de Bakou dans le Haut-Karabakh, l’Azerbaïdjan accentue son contrôle du territoire reconquis. De nombreux check points, tenus par des gardes russes ou azerbaïdjanais, en contrôlent l’accès. La quasi-totalité de la population arménienne a fui le Haut-Karabakh en quelques jours en septembre dernier. 

Le président Aliev est allé planter le drapeau de l’Azerbaïdjan dans l’ancienne capitale, Stepanakert pour les Arméniens, désormais rebaptisée Khankendi. La question se pose désormais de savoir comment Bakou entend intégrer le Haut-Karabakh au reste du pays. 

"Nous sommes heureux d'avoir récupéré nos terres. Pendant 30 ans, les Arméniens les ont occupées. Et puis ils ont emporté tous leurs biens et ils sont partis. Ce qui leur est arrivé, c'est la même chose que nous avions vécu, nous aussi", poursuit cet ouvrier. Le long du corridor de Latchine, des carcasses de voitures, des sacs de vêtements éventrés témoignent de l'affolement de l'exode. Quant aux Azerbaïdjanais, ils commencent à revenir s'installer dans les maisons qu'ils avaient dû quitter lors de la première guerre, au début des années 1990. C'est le cas de la famille de Leyla, revenue il y a un mois à peine. 

"Je n'aurais jamais pensé pouvoir rentrer dans ma patrie au bout de 31 ans."

Leyla, une Azerbaïdjanaise de retour dans le Haut-Karabakh

à franceinfo

"Tous les jours, j'attendais cela, assure Leyla. J'en rêvais tous les soirs. Grâce à Dieu, ce rêve est réalisé. Que Dieu bénisse ceux qui sont morts ! Longue vie au président de la République ainsi qu'aux vétérans de la guerre. C'est grâce à eux que nous avons pu revenir. Nous sommes heureux, très heureux. Vous ne pouvez pas imaginer". 

La vie d'exilé n'était pas facile tous les jours, se souvient sa fille Leman : "On avait l'étiquette du réfugié et cela me faisait mal. Voilà dans quelles conditions nous avons vécu à cause des Arméniens". Elle n'a pas eu une larme pour les Arméniens qui ont dû fuir à leur tour. "Ils devaient partir, cette terre, c'est à nous", poursuit-elle. 

L'un de ses fils, qui a 13 ans, sait déjà que plus tard, il veut être "un guerrier", "pour protéger la patrie contre les Arméniens car tôt ou tard, ils essaieront de revenir, mais ils trouveront face à eux l'armée d'Azerbaïdjan". La réconciliation que le gouvernement azerbaïdjanais dit vouloir semble donc encore une chimère.

Haut Karabakh : le retour des Azerbaïdjanais - Reportage de Marie-Pierre Vérot

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