Quatre questions sur les policiers "déguisés" en manifestants
Deux rassemblements en hommage au militant mort sur le site du barrage de Sivens ont dégénéré, samedi et dimanche. Des images montrant des hommes en civil portant un brassard de police ont interpellé des internautes. Explications.
Ils portent un jean, un sweat-shirt et un blouson, et participent à un rassemblement en hommage à Rémi Fraisse, à Nantes (Loire-Atlantique), samedi 1er novembre. S'agit-il de manifestants ? De casseurs ? Non : de policiers. Plusieurs images, notamment une séquence vidéo publiée sur Taranis News.com, montrent ces hommes en civil, cagoulés ou le visage couvert par un foulard. Et, à la main, un bâton télescopique (une matraque rétractable) destiné à frapper d'éventuelles cibles.
Leur présence parmi les manifestants a suscité de vives réactions à la gauche de la gauche. Alexis Corbière, du Parti de gauche (PG), juge sur Twitter cette pratique "intolérable", tandis qu'Olivier Besancenot, du Nouveau parti anticapitaliste (NPA), souhaite qu’un débat public soit lancé à ce sujet et réclame la création d’une commission d’enquête, selon BFMTV. Francetv info résume les faits en quatre grandes questions.
Qui sont ces hommes ?
Olivier Besancenot ne s'y trompe pas, ces hommes sont bien des policiers. "Ce sont des fonctionnaires en civil, surtout de la brigade anti-criminalité (BAC)", reconnaît Fabien Vandermerlick, secrétaire national au syndicat de police Alliance, sur L'Express.fr. La plupart arborent d'ailleurs un brassard orange ou une inscription "police" sur le torse, afin de se distinguer des manifestants.
Pourquoi sont-ils grimés ainsi ?
L'objectif de la police est d'infiltrer les manifestants. "Ils s'infiltrent dans les cortèges pour repérer et neutraliser les individus violents avant qu'ils ne fassent n'importe quoi. Ils sont aussi chargés d'interpeller en flagrant délit pour qu'il y ait des preuves", poursuit Fabien Vandermerlick. Jouent-ils les casseurs, provoquent-ils les autres manifestants ? "Ils peuvent crier ou siffler pour imiter les manifestants, mais ils ne vont pas jeter des pavés sur leurs collègues, c'est de la science-fiction", dit-il.
Cette pratique du "déguisement" est-elle courante ?
Si le débat sur ces policiers "déguisés" en manifestants ressort, c'est d'abord parce que plusieurs images d'eux, photo ou vidéo, ont été prises lors des manifestations en hommage à Rémi Fraisse, ce qui n'est pas toujours le cas. Pourtant, cette pratique n'a rien d'inhabituel, comme l'indique sur BFMTV Nicolas Comte, secrétaire général adjoint du syndicat Unité SGP Police FO : "Forcément, quand il y a ce type de manifestations, il y a des policiers en civil qui ont pour mission de procéder à des interpellations. Donc, ils ont des looks destinés à passer inaperçus."
La cagoule ou le foulard à tête de mort, c'est normal ?
Une des images les plus reprises sur les réseaux sociaux montre deux policiers en civil, dont le visage est dissimulé par un foulard à tête de mort, le même qui a valu à un légionnaire de l'armée française, engagé au Mali, d'être suspendu, début 2013. Sur ce point, les analyses diffèrent. Patrick Chaudet, le directeur départemental de la Sécurité publique (DDSP) d'Ille-et-Vilaine, assure que les policiers ne portent généralement pas de masques : "Il arrive que des fonctionnaires effectuent un travail de renseignement, en se mêlant à la foule, mais toujours à visage découvert, pas cagoulés", affirme-t-il à Ouest France.
Intolérable, des fonctionnaires de police arborent foulards à tête de mort alors qu'ils devraient calmer les esprits pic.twitter.com/UHRjoxAwlH
— Corbiere Alexis (@alexiscorbiere) November 3, 2014
Contacté par francetv info, Loïc Fanouillère, secrétaire zonal du syndicat de police Alliance pour l'ouest de la France, estime que ce comportement est "un phénomène marginal" et qu'il vise avant tout à protéger les policiers : "Sur internet, certains militants extrémistes stigmatisent les policiers à partir de photos ou de vidéos d'eux à visage découvert." Selon L'Express, à la tête du syndicat, "on reconnaît à demi-mots que la tenue peut être quelque peu 'provocatrice', mais on demande à ce que le cliché soit authentifié".
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