Biodiversité : des espèces exotiques, animales ou végétales, envahissent le sud de la France, favorisées par le réchauffement climatique
"Ça fait dix ans qu'on est envahi par les méduses. Pourquoi ?" Roland Guerrero peste et s'interroge au moment de relever son filet à poissons. Une espèce invasive cousine de la méduse s'est invitée dans l'étang et pèse lourd dans le filet du pêcheur. Ce sont des groseilles de mer, des petites boules gélatineuses translucides, présentes en grand nombre. "À deux on n'arrivait pas relever les filets à la main. Au lieu de faire 100 kilos, il faisait trois tonnes tellement qu'il y en avait. Il fallait taffer pendant deux heures. Ça se reproduit à une vitesse folle."
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Depuis 40 ans qu'il pêche sur l'Étang de l'Or, Roland Guerrero a vu ces espèces invasives exotiques venir, rester et parfois repartir. Par exemple il montre les crabes blancs de petites taille. "Ce sont des crabes américains à pattes blanches. Il ne sont pas gros. Ça fait au moins trois ou quatre ans qu'ils sont là." Cette espèce est certainement arrivée comme la plupart des espèces exotiques : avec l'homme, accrochée à un bateau et venue d'autres continents. Autre exemple : l'écrevisse d'Amérique, très présente dans l'étang. Le pêcheur confirme qu'il en fait "des captures assez abondantes".
Un danger pour les espèces locales
Ludovic Cases, un technicien du Syndicat mixte du bassin de l'Or, ne cache pas son inquiétude vis-à-vis de ces espèces invasives. "On se dit que dans une mare ou un marais, elle peut décimer les populations, peut-être la végétation mais aussi des populations de larves, de libellules et de petits invertébrés aquatiques". C'est la crainte des scientifiques : celle d'une "espèce qui vient perturber l'équilibre de toutes les autres".
Avec le réchauffement climatique, ces animaux exotiques commencent à se plaire sous nos latitudes. Ludovic Cases le voit, "on a de plus en plus des hivers qui sont peu rigoureux et donc ça permet à ces espèces qui sont exotiques de prospérer quasiment ou de vivre en léthargie facilement en hiver et de ne pas être vraiment tuées par les gels qui étaient autrefois assez bien présents".
Le réchauffement climatique accélère aussi le cycle des animaux, et notamment celui du terrible crabe bleu. Cette espèce fait peur dans la région parce qu'il semble manger toutes les autres espèces. Nathalie Barré, spécialiste du crabe bleu au Conservatoire d'espaces naturels, nourrit un sérieux motif d'inquiétude : "Le cycle de reproduction du crabe bleu pourrait être amené à se faire plus vite, potentiellement. C'est ce qu'on a pu voir aussi par exemple en Sicile. Les femelles crabes bleues peuvent être porteuses d'œufs assez tôt dans la saison et aussi plusieurs fois dans l'année."
Elles font beaucoup d'œufs, pour certaines plus de 2,5 millions. Et pour surveiller la présence du crabe bleu, que les pêcheurs aperçoivent régulièrement dans l'Étang de l'Or, des scientifiques du ministère de la Transition écologique vont réaliser dans quelques jours des prélèvements d'ADN environnemental dans les eaux de l'étang.
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