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Réchauffement climatique : "Il est possible d'agir en réduisant les émissions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs", assure l'experte Valérie Masson-Delmotte

Alors que la première semaine de juillet a été la plus chaude jamais enregistrée, selon l'Organisation météorologique mondiale (l'OMM), la paléo-climatologue Valérie Masson-Delmotte alerte sur l'urgence d'agir. Pour elle, il faut que les responsables politiques continuent de respecter leurs engagements.
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Valérie Masson-Delmotte, paléo-climatologue et coprésidente du groupe de travail sur les bases physiques du climat au GIEC. (FRANCK FIFE / AFP)

"Il est possible d'agir en réduisant les émissions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs" rappelle Valérie Masson-Delmotte lundi matin sur franceinfo. La paléo-climatologue et coprésidente du groupe de travail sur les bases physiques du climat au GIEC estime qu'il faut "s'appuyer sur les connaissances scientifiques" pour "anticiper ces conditions climatiques inédites" et "limiter la casse". 

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franceinfo : Le monde a connu son mois de juin le plus chaud jamais enregistré. Nous ne sommes donc pas en train de vivre un été normal, comme l'a dit le ministre de l'Agriculture, que vous avez repris sur les réseaux sociaux ce week-end ?

Valérie Masson-Delmotte : J'ai rappelé les éléments factuels et je pense qu'il y a une responsabilité importante pour ceux qui sont élus, qui ont une représentation ou un rôle important au niveau du gouvernement. Parce que finalement, il y a les aspects aigus du changement climatique comme les records qui marquent les esprits. Mais il y a aussi ces aspects chroniques, insidieux : une chaleur intense, sans record ; la montée graduelle du niveau de la mer qui accélère, on a actuellement une fonte record au Groenland. C'est important de montrer là où il est possible d'agir. Et il est possible d'agir en réduisant les émissions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs.

Il y a des solutions qui existent, qui ont besoin d'être appliquées à grande échelle. Et il est aussi possible d'agir en s'appuyant sur ces connaissances scientifiques. Pas simplement là où on en est aujourd'hui, mais sur les évolutions à venir, de sorte à en tenir compte pour la gestion de risques. Pour anticiper ces conditions climatiques inédites, pour vivre le mieux possible et limiter la casse. Je rappelle que l'année dernière, rien que dans l'Union européenne, il y a eu 60 000 décès, et pas un seul portrait dans les médias d'une de ces personnes : 3/4 d'entre elles ont plus de 75 ans, beaucoup sont des femmes.

Est-ce que la situation est hors de contrôle ?

Non. On a actuellement un événement, El Nino, qui en se superposant à l'accumulation de chaleur qui est causée par les effets de nos émissions de gaz à effet de serre, va entraîner des records de chaleur qui vont se poursuivre jusqu'à la fin de cette année, voire l'année prochaine. Et ce qui est important de comprendre, c'est que le moteur de ce réchauffement, ce sont nos émissions de gaz à effet de serre.

Le premier facteur du réchauffement [climatique], c'est le fait de brûler du charbon, du pétrole, du gaz fossile. Et pour s'en débarrasser, il y a un ensemble de solutions.

Valérie Masson-Delmotte

franceinfo

Les constats scientifiques sont très clairs : les nouveaux investissements dans les énergies fossiles ne sont pas compatibles avec l'accord de Paris sur le climat si on n'est pas capable – et ce n'est pas le cas aujourd'hui – d'investir suffisamment pour capter et éliminer les émissions de gaz à effet de serre. Le premier facteur du réchauffement [climatique], c'est le fait de brûler du charbon, du pétrole, du gaz fossile. Et pour s'en débarrasser, il y a un ensemble de solutions. L'enjeu, c'est de pouvoir les déployer le plus rapidement possible.

Le gouvernement nous avait promis une planification écologique. C'est un argument de campagne d'Emmanuel Macron, énoncée lors de l'élection présidentielle de 2022. Est-ce que cet argument était uniquement politique selon vous, ou est-ce que le président de la République a mis en place quelque chose qui ressemble à une planification écologique ?

Oui, c'est un point qui est extrêmement important de construire intelligemment des politiques sociales, économiques qui permettent de déployer les solutions qui vont permettre de continuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre. La France peut donner l'exemple. Elle a déjà réussi à décarboner sa production électrique et elle peut construire une stratégie intelligente, favorable à l'emploi, qui permet de s'adapter tout en préservant la biodiversité.

L'année dernière, sur les objectifs que la France s'était fixés sur le budget carbone, le Haut Conseil pour le climat a montré que si on tient compte de l'état des forêts, on n'y arrive pas. Cela montre l'enjeu à changer d'échelle et à mettre aussi dans la planification budgétaire les moyens suffisants pour pouvoir aller plus vite sur notre capacité à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

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