Reportage "On peut avoir des vallées entières touchées" : dans les Alpes, le dérèglement climatique menace les refuges et les autres infrastructures

D'après un scientifique du CNRS, dans les Alpes, 947 structures sont implantées sur le permafrost, le sous-sol gelé qui fond peu à peu. Autant d'éléments menacés par le dérèglement climatique, causé par les activités humaines.
Article rédigé par Boris Hallier
Radio France
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Un refuge dans le parc national des Ecrins, dans les Alpes, en juin 2017. Illustration. (JEAN-PIERRE CLATOT / AFP)

Refuges, remontées mécaniques : en montagne, les infrastructures peuvent être menacées par le réchauffement climatique. La déstabilisation du permafrost et la fonte des glaciers fragilisent les structures. C'est le cas dans les Alpes, où certains bâtiments ont même dû être fermés ces dernières années. Le Refuge de la Pillatte est emblématique, situé au plus près du glacier du même nom, au cœur du massif des Ecrins en Isère. Aujourd’hui, impossible d'y accueillir les alpinistes de passage. Les risques d'effondrement du bâtiment sont trop importants à cause de la fonte du glacier. 

"C'est un phénomène qui n'est pas nouveau puisque depuis la fin du petit âge glaciaire [approximativement entre le début du XIVe siècle et la fin du XIXe siècle], c'est un glacier qui a énormément reculé", explique Maria Isabel Le Meur, la directrice adjointe de la Fédération des clubs alpins et de montagne. "Par contre, ce qui est nouveau, c'est que le bâtiment a été fortement déstabilisé", ajoute-t-elle. Une situation qui oblige à "fermer au public" le refuge.

Le dérèglement climatique a donc des "conséquences importantes pour la pratique de la montagne et pour le territoire". En tout, 6 000 à 7 000 personnes étaient accueillies chaque année dans ce refuge, l'un des 115 bâtiments gérés par la Fédération des clubs alpins.

"Jusqu'où va-t-on dans la protection ?"

Crues torrentielles, avalanches, glissements de terrain : les montagnards sont habitués à ces phénomènes extrêmes, mais ils constatent qu'ils sont de plus en plus intenses. "C'est sûr qu'on les voit de plus en plus, poursuit Maria Isabel Le Meur. La question se pose : jusqu'où va-t-on dans la protection de ces bâtiments ?" Elle raconte que "la question s'est posée" sur un refuge. Pour le protéger, "il aurait fallu construire un mur de plus d'une centaine de mètres de long, en plein cœur d'un parc national". "Là, clairement, la réponse est non. On ne peut pas aller aussi loin", conclut-elle.

Autre source de déstabilisation : le permafrost, le sous-sol gelé, qui se dégrade. "On parle de béton de glace, de ciment de glace. Le permafrost, normalement, c'est quelque chose qui devrait être stable", soutient Ludovic Ravanel, directeur de recherche au CNRS. 

"Aujourd'hui, si ce permafrost se dégrade, c'est effectivement en raison de l'accélération du réchauffement climatique."

Ludovic Ravanel, directeur de recherche au CNRS

franceinfo

Le scientifique expose que cela "pose toute une série de problématiques de sécurité pour les alpinistes, pour les infrastructures, voire pour les vallées puisque, maintenant, on a des déstabilisations avec des volumes qui dépassent plusieurs millions de mètres cubes. On peut avoir ainsi des vallées entières touchées par ces phénomènes".

Selon Ludovic Ravanel, 947 structures sont implantées sur le permafrost dans les Alpes. Des refuges, des remontées mécaniques, des pylônes électriques ou des antennes, qui sont autant d'infrastructures à surveiller avec attention.

Les refuges alpins victimes du réchauffement climatique : reportage de Boris Hallier

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