Extraction minière en haute mer : une coalition d'Etats à la manœuvre pour la création d'un code minier des fonds marins
Moins de deux semaines après l'accord historique pour protéger la haute mer, les négociations sur l'extraction minière sous-marine ont repris cette fin de semaine en Jamaïque. L’autorité internationale des fonds marins, qui appartient à l’ONU, réunit son conseil pendant quinze jours à Kingston pour tenter d’avancer sur la délicate question de l’exploitation des grands fonds, dans lesquels se trouvent notamment des gisements miniers.
Des industriels sont déjà dans les starting-blocks pour envoyer des engins à 4 000 mètres de profondeur, capables de moissonner les fonds pour remonter à la surface des nodules polymétalliques qui sont comme des pommes de terres noires chargées en métaux et qui pourraient intéresser les industries de transition énergétique.
Une course contre la montre
Ce n’est plus de la science-fiction : les machines existent. Et un compte à rebours a été lancé par des industriels canadiens pour tenter d’obtenir une licence d’exploitation. Le temps presse, dit Anne-Sophie Roux, qui fait partie de la "Sustainable ocean alliance" : "Une course contre la montre a été activée en juin 2021 par une entreprise minière canadienne qui s'appelle The Metals Company qui, en gros, donne deux ans à tous les États membres de l'Autorité internationale des fonds marins pour se mettre d'accord sur un code minier, c'est-à-dire un cadre réglementaire, avant d'ouvrir la voie à l'exploitation minière des fonds marins. Donc là, il est urgent de trouver un moyen d'interrompre cette course contre la montre."
Les Etats estiment aujourd’hui que le code minier ne sera pas adopté dans les temps. et cela risque de laisser le champ libre aux industriels pour l’exploitation. Ce qui serait catastrophique, estime Francois Chartier de Greenpeace : "On va se retrouver avec une exploitation sans cadre juridique, sans code minier, sans prise en compte des menaces environnementales, et des entreprises qui commenceraient à exploiter les nodules alors que la mobilisation, y compris des États, est forte et que de plus en plus d'États s'y opposent."
Une coalition de seize pays tente de construire un front
Pour tenter de faire barrage aux partisans de l’exploitation, une coalition de seize pays parmi lesquels la France va tenter de construire un front. Emmanuel Macron s’est prononcé pour l’interdiction. "L'idée, c'est d'aboutir à un moratoire sur une durée de quinze à vingt ans, pour pouvoir voir l'ensemble des scientifiques, souligne Olivier Poivre d’Arvor, l’envoyé du président. On ne connaît que 3% des fonds marins aujourd'hui, et cela permettrait d'avoir des données suffisantes pour pouvoir, peut-être d'ici 20 ans, de se réunir de nouveau et savoir si on a la capacité d'aller chercher ce dont on aurait besoin."
La bataille des grands fond va durer au moins jusqu’au mois de juillet prochain. Les partisans du moratoire espèrent que la dynamique des derniers grands sommets sur l’océan va jouer en leur faveur.
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