#MontéeDesEaux : découvrez si votre commune est grignotée par l'érosion du littoral
Les effets conjugués de l'érosion des côtes et de la montée des océans liée au réchauffement climatique entraînent déjà le recul de 20% des côtes françaises. Parcourez notre carte et nos infographies pour découvrir les communes où le littoral perd le plus de terrain.
La mer monte et le littoral change de visage. Tantôt il recule, tempête après tempête, tantôt il avance, constructions après constructions. Pour comprendre comment évoluent les côtes françaises, y compris celles près de chez vous, plusieurs données permettent de comparer la situation actuelle à celle d'il y a plusieurs décennies.
Les données en question sont celles du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema). Leurs équipes ont analysé des photos aériennes datant des années 1930 à 1950, et les ont comparées avec des images plus récentes. Leur objectif : observer si le trait de côte, matérialisé par le bord d'une falaise ou une ligne de végétation sur le sable, a reculé ou avancé.
Quelles sont leurs conclusions, rendues publiques en 2018 ? Au niveau national, 18,6% du littoral a vu son trait de côte reculer, soit 900 km, parfois de plusieurs mètres par an, sur des périodes de 50 à 70 ans. L'institut a également calculé que 11,7% du territoire connaît une avancée du trait de côte, et qu'une grande majorité du linéaire, 69,7%, n'a pas connu d'évolution perceptible.
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Un phénomène disparate selon la géologie
D'après le Cerema, "523 communes possèdent au moins un secteur touché par un recul du trait de côte". Et pour 59 d'entre elles, le recul à certains endroits est de plus de 1,5 mètre par an en moyenne. Les côtes près desquelles vous habitez, ou que vous connaissez, sont-elles concernées ?
A l'aide de notre carte interactive et de son moteur de recherche (la loupe au bas de la carte), vous pouvez rechercher une commune et observer si le trait de côte a reculé (en rouge), avancé (en bleu) ou n'a pas bougé (en gris), comme c'est beaucoup le cas en Bretagne par exemple. Ou cliquez sur un département pour consulter l'évolution de son littoral.
Les côtes de l'outre-mer sont bien représentées dans cette carte : vous y serez conduits après avoir renseigné un nom de commune ou de département d'outre-mer dans le moteur de recherche de la carte.
Les côtes françaises sont inégalement touchées par le phénomène, en fonction de leur profil géologique. Les falaises et côtes rocheuses, qui représentent 54% du littoral français, connaissent un recul du trait de côte sur 6% de leur linéaire seulement. Tandis que les côtes sableuses, qui représentent 41% du linéaire, connaissent un recul du trait de côte pour 37% et une avancée dans 23% des cas.
Résultat : les départements aux longues plages de sable sont les plus concernés par le recul du trait de côte. Les plus touchés sont la Gironde, la Manche et la Charente-Maritime. En cinquante ans, les zones en recul correspondent à une perte de surface de 30 km2, principalement en Gironde et en Charente-Maritime, au sud de l'île d'Oléron.
Quand l'érosion menace les habitations
Sur la façade atlantique de la commune de La Tremblade, certaines dunes ont accusé un recul record de 7,9 m par an entre 1945 et 2010. Les photos ci-dessous, prises en 1957 (à droite) et 2018 (à gauche), permettent de se rendre compte de l'avancée de l'océan sur les dunes végétalisées.
A cet endroit précis, le recul de la côte n'a pas d'impact sur des zones habitées. C'est en revanche le cas à quelques kilomètres plus au sud, à Soulac-sur-Mer et son immeuble résidentiel "Le Signal", construit dans les années 1970 à 200 m de la mer, et devenu un des symboles de l'érosion côtière. D'après les données du Cerema, le trait de côte y a reculé de 4,3 m par an entre 1957 et 2013. Et de plus de 30 m lors de la tempête de l'hiver 2013-2014. Vidé de ses habitants, il fait l'objet d'un long feuilleton judiciaire, récemment ponctué par la décision du Sénat, en juillet 2020, d'indemniser les copropriétaires des lieux. Les premières indemnisations ont été versées au mois de mars 2021.
Parfois, le trait de côte n'accuse que peu ou pas de recul, mais les conséquences ne manquent pas d'inquiéter riverains et chercheurs. A l'entrée de la presqu'île de Gâvres, non loin de Lorient, l'érosion menace la seule route permettant d'accéder à la commune. Et augmente le risque de submersion. En 2008, un mur de protection avait cédé, laissant la voie libre à l'océan pour inonder une partie du bourg.
Mais l'endroit où la côte recule le plus est sans conteste en Guyane. Sur le littoral de la commune d'Awala-Yalimapo, entre 1950 et 2006, le trait de côte a reculé à certains endroits de plus de 60 m par an, d'après les données du Cerema. Un phénomène exceptionnel lié au déplacement d'un banc de vase le long de la côte, bien connu des habitants.
Des scénarios plus ou moins inquiétants
A d'autres endroits, au contraire, la côte gagne du terrain sur la mer. La plupart du temps, cette avancée intervient après la construction d'ouvrages tels que des digues, qui a tendance à modifier la sédimentation aux alentours, provoquant par exemple une accumulation de sable d'un côté de la digue.
C'est au Grau-du-Roi (Gard) que le trait de côte a le plus avancé. A certains endroits dans cette zone, le littoral a gagné plus de 15 m par an entre 1937 et 2011, d'après les données du Cerema. Cela s'explique par la construction d'un port de plaisance et d'une digue, qui a bloqué la circulation du sable, lequel s'est accumulé au sud.
La comparaison des photographies aériennes, prises entre 1963 (à droite) et 2018 (à gauche), permet de visualiser l'avancée du port sur la mer.
Que nous réserve l'avenir ? Dans les prochaines décennies, le trait de côte devrait selon les prévisions continuer de reculer à certains endroits et les côtes sableuses seront toujours les plus touchées. Dans une étude publiée en 2016, l'Observatoire de la côte aquitaine envisageait une érosion de 50 m de la côte d'ici 2050, "à laquelle s'ajoute un recul lié à un événement majeur en général de l'ordre de 20 m". L'Observatoire a calculé que le recul du trait de côte pourrait atteindre des valeurs plus élevées que prévu précédemment, à savoir "des reculs moyens de 2,5 m par an en Gironde et de 1,7 m par an dans les Landes".
Et les conséquences pourraient être lourdes. Le Cerema a tenté de chiffrer le bilan des différents scénarios d'un recul du trait de côte plus ou moins marqué. D'ici 2100, ce sont entre 5 000 et 47 300 logements qui pourraient être victimes de l'érosion, en fonction des différentes hypothèses étudiées, avec un coût de 0,8 à 8 milliards d'euros. Selon un rapport à paraître, ce serait également entre 120 et 1 000 km de routes qui seraient touchés. Des fourchettes certes larges, mais qui permettent d'évaluer ce qui attend l'Hexagone.
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