Qu'est-ce que le "medicane", ce cyclone de type méditerranéen qui a ravagé la Libye ?
La Libye compte ses morts. Au moins 2 300 personnes ont perdu la vie et 5 000 sont portées disparues, selon les derniers chiffres communiqués mardi 12 septembre par le porte-parole des services de secours libyens, après les inondations d'ampleur qui ont ravagé l'est de ce pays d'Afrique du Nord. Ces intempéries sont la conséquence de la tempête Daniel, qui, après avoir dévasté une partie de la Grèce, de la Turquie et de la Bulgarie, a traversé la Méditerranée en se renforçant au passage. C'est ce que les spécialistes appellent un "medicane", un cyclone de type méditerranéen. Franceinfo fait le point sur ce phénomène exceptionnel.
Un cyclone qui trouve son origine dans l'air chaud de la Méditerranée
Un "medicane" – contraction de "méditerranéen" et "hurricane" ("ouragan" en anglais) – est un cyclone subtropical très violent. "C'est la rencontre entre une masse d'air fraîche en altitude et une autre plus chaude qui vient de la mer Méditerranée", explique le climatologue Davide Faranda, chercheur au CNRS et spécialiste des événements extrêmes et de leur lien avec le changement climatique.
Dans le cas de la Libye, la tempête Daniel s'est retrouvée à stagner au-dessus de la mer Méditerranée, dont la température de l'eau est anormalement élevée, de "3 à 4°C au-dessus de la moyenne [24-25°C]".
"Plus la mer est chaude, plus il y a d'évaporation [une atmosphère plus chaude de 1°C peut contenir 7% de vapeur d'eau en plus] et donc d'énergie pour le cyclone, qui agit comme une centrifugeuse."
Davide Faranda, climatologueà franceinfo
Le cyclone profite ainsi d'une atmosphère chaude et humide pour se recharger, "ce qui entraîne ces orages".
Une intensité renforcée avec le réchauffement climatique
Si ce type de cyclone n'est pas nouveau, le réchauffement climatique influe sur sa violence. "Il augmente leur intensité. Pour la Libye, c'est la température de la mer Méditerranée, dont l'augmentation est liée au changement climatique, qui a déclenché ces orages", explique le climatologue Davide Faranda. En revanche, la fréquence de ces phénomènes météo "ne semble pas être influencée par le réchauffement climatique".
"Ces medicanes ont toujours existé. Il y en a entre zéro et deux par an."
Davide Faranda, climatologueà franceinfo
"Nous pensons que le changement climatique augmente l'intensité des 'medicanes' les plus puissants et nous sommes convaincus qu'il augmente les précipitations associées à de telles tempêtes", résume Liz Stephens, professeure à l'université de Reading (Royaume-Uni), sur le site de la faculté britannique.
Un risque accru à l'avenir pour l'Italie, la Grèce et la Corse
En raison du réchauffement climatique, ces phénomènes "concerneront des zones qui n'ont pas l'habitude de recevoir autant de précipitations et qui n'auront pas forcément les moyens de s'en remettre", prévient l'agroclimatologue Serge Zaka sur la plateforme X (ex-Twitter). "La côte est de l'Italie, la Grèce et les îles espagnoles risquent d'être les plus touchées", abonde Davide Faranda, qui justifie cette vulnérabilité par "des côtes pas protégées et des déficits sur les systèmes de protection contre les submersions".
Si la France n'est pas le pays le plus exposé, le climatologue juge que la Corse, déjà touchée par des "medicanes" dans le passé, est plus vulnérable en raison de ses caractéristiques géographiques. Ses montagnes peuvent en effet favoriser des engorgements des cours d'eau suite au passage d'un cyclone subtropical et son positionnement, au cœur de la Méditerannée, l'expose davantage.
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