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La corruption fait de nouveau descendre les Roumains dans la rue

Depuis la fin du communisme et la mort de Ceausescu en 1989, la Roumanie ne parvient pas à purger de la corruption la classe politique. Les scandales succèdent aux scandales, dans un pays qui reste très pauvre. Cette fois, le pouvoir a décidé d’adopter des décrets d’amnistie pour sauver une classe politique poursuivie par la justice.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 2min
200.000 personnes ont manifesté dans toute la Roumanie le 1er février 2017. (DANIEL MIHAILESCU / AFP)

La Direction nationale anticorruption (DNA) a été créée en 2002. Elle a obtenu ces dernières années la condamnation de nombreux élus et hommes d'affaires, lançant des investigations tous azimuts. Depuis 2010, «plus de 3000 ministres, députés, sénateurs, maires et hauts fonctionnaires, qui se pensaient intouchables, se sont retrouvés en prison», observe Le Monde
 
Cela fait beaucoup ! Aussi, les critiques fusent sur le pouvoir supposé excessif de la DNA. Elles émanent en particulier du parti au pouvoir,le Parti social-démocrate (PSD). Nombre de ses élus sont poursuivis par la justice, voire emprisonnés. Son chef de file Liviu Dragnea est lui-même accusé dans une affaire d’emplois fictifs. Il a dû abandonner l’idée de diriger le gouvernement pour laisser le rôle à Sorin Grindeanu.
 
Alors, en catimini, le pouvoir a adopté un décret qui dépénalise plusieurs infractions et rend l'abus de pouvoir, un chef d'inculpation fréquent, passible de peines de prison uniquement s'il provoque un préjudice supérieur à 44.000 euros. Parallèlement, il y a le projet de grâce présenté au Parlement, concernant 2500 détenus purgeant des peines allant jusqu’à cinq ans de prison.


Officiellement, il s’agit de désengorger les prisons. Mais par la même occasion, cela rendra la liberté à des notables du parti au pouvoir. Voilà qui fait descendre de nouveau les Roumains dans la rue, manifestant contre ce parti qu’ils ont pourtant conduit au pouvoir il y a peu. En effet, les sociaux-démocrates ont obtenu 45% des voix aux législatives du 11 décembre 2016, ridiculisant les libéraux du président de la République Klaus Iohannis.
 
Est-ce à dire que les Roumains sont versatiles? Non. Il y a surtout un fort clivage entre les villes et les campagnes. Et c’est la Roumanie rurale qui a porté le PSD au pouvoir, malgré toutes les casseroles qu’il traîne. D’ailleurs, il avait déjà remporté les municipales à la mi-2016 avec plus de 40% des voix.
 
Le président Iohannis fait figure de rempart aux petits arrangements du PSD. Il a du reste sonné le tocsin, dénonçant «une grave violation de l’indépendance de la justice» et saisissant la Cour constitutionnelle.
 
Démarche peu commune, les représentants diplomatiques des Etats-Unis, du Canada, d’Allemagne, de France, des Pays-Bas et de Belgique ont publié une déclaration commune dans laquelle ils expriment leur «profonde inquiétude» quant à l’avenir du pays.

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