"C'est important de reconnaître le génocide" : à Kiev, le mémorial de l'Holodomor retrace l'histoire de cette famine orchestrée en Ukraine par Staline
Alors que les députés français examinent mardi 28 mars une proposition de loi transpartisane pour reconnaître l'Holodomor comme génocide, le sujet ne fait plus débat en Ukraine depuis 20 ans. À Kiev, par exemple, le mémorial qui remémore l'histoire de cette grande famine orchestrée par Staline et dans laquelle cinq millions de personnes ont péri entre 1932 et 1933 s'appelle le "Musée national de l'Holodomor et du génocide".
"Suivez moi, on continue la visite en groupe", nous dit la guide Olga à l'entrée de cette espace circulaire sans fenêtre, hors du temps et surplombé d'une grande tour en forme de bougies. Les visiteurs du jour Volodymyr, Valentina et leur petit garçon de huit ans ont été chassés de Kherson par les Russes au tout début de la guerre en Ukraine. "Mon fils grandit et je veux qu'il sache ce qu'il s'est passé il y a 100 ans, explique Volodymyr. La Russie veut nous exterminer. Je veux que mon fils comprenne qu'il est ukrainien et qu'il connaisse l'histoire de son pays".
Le petit Yaroslav nous parle, lui, du présent et de l'armée de l'armée de Vladimir Poutine : "C'est très mal. Ils nous ont chassés de notre maison et ça faisait très peur". "Un de nos proches a disparu et nous n'avons aucune nouvelle, poursuit le père. Ça fait sept mois. À Kherson, si tu dis 'gloire à l'Ukraine', au pire tu es tué sur place. Au mieux, tu es emmené dans un sous sol et frappé. Je l'ai vu. Ils sont arrivés pour nous exterminer".
"Dites à vos amis français que pour moi, rien n'a changé depuis un siècle".
Volodymyr, père de famille ukrainien chassé de Khersonà franceinfo
Les Français n'ont pas toujours saisi la violence de la répression russe, estime un des responsables du Mémorial, Mykhaïlo Kostiv : "La France, c'est un cas particulier parce que dans les années 30, Edouard Herriot [alors président du Conseil des ministres], un homme politique, niait l'existence de l'Holodomor et une partie de la gauche soutenaient la propagande soviétique. Mais la France est un pays civilisé et c'est important de reconnaître le génocide, même si c'était il y a longtemps".
Mykhaïlo Kostiv a lui aussi perdu des ancêtres victimes des méthodes staliniennes. Ce n'était pas pendant l'Holodomor, mais quelques années plus tard, pendant les grandes purges, au tout début de la Seconde Guerre mondiale.
L'invasion russe a poussé certains responsables politiques européens à réinterroger l'histoire de l'Ukraine. Depuis le mois de décembre, le Parlement européen mais aussi les députés bulgares et allemands ont ainsi reconnu l'Holodomore (littéralement "extermination par la faim") comme un génocide.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.