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Guerre en Ukraine : les hôpitaux manquent "de matériel chirurgical, de sang, de produits de perfusion, d'antibiotiques"

Le médecin Raphaël Pitti, anesthésiste-réanimateur, vient de rentrer d'un séjour de plusieurs jours en Ukraine, où il veut installer un centre de formation à la médecine de guerre. Il alerte sur les armes utilisées par l'armée russe, et sur la situation catastrophique des hôpitaux ukrainiens.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Photo prise à l'hôpital de Zaporijia (Ukraine) le 18 avril 2022 (ED JONES / AFP)

Les hôpitaux ukrainiens fonctionnent "très mal" car ils manquent "de matériel chirurgical, de sang, de produits de perfusion, d'antibiotiques", rapporte l'anesthésiste-réanimateur Raphaël Pitti mardi 19 avril sur franceinfo. Il a passé quatre jours à Lviv, en Ukraine, pour faire du repérage afin d'installer un centre de formation à la médecine de guerre.

franceinfo : Vous allez ouvrir un centre de formation à la médecine de guerre en Ukraine, comme vous l'avez fait en Syrie. S'agit-il des mêmes blessures ?

Dr Raphaël Pitti : Absolument. La guerre, où qu'elle soit, amène ce type de pathologies qui sont propres à la guerre ou, plus largement, aux catastrophes. De surcroît, il y a l'utilisation d'un certain nombre d'armes, à la fois le napalm, le phosphore, le chimique. Il est vraiment important de mettre en place un cours, comme nous l'avons fait en Syrie, sur la prise en charge des blessés chimiques parce que je suis persuadé que les Russes utiliseront l'arme chimique, en particulier à Marioupol parce que les combattants sont diffus dans la ville, dans la zone industrielle. Ils sont cachés donc ce sera extrêmement difficile de les sortir. Seul le chimique va pouvoir le faire et les Russes l'ont déjà fait.

Comment fonctionnent les hôpitaux en ce moment en Ukraine ?

Très mal. Ils sont amenés à travailler en situation dégradée. Ils finissent par manquer de matériel chirurgical, de sang, de produits de perfusion, d'antibiotiques. Ce sont des situations qui ont été vécues à Alep et à La Ghouta en Syrie, avec 2 000 à 3 500 blessés, des brûlés graves, impossible de les évacuer parce qu'il n'y a pas de couloir humanitaire pour le faire. C'est une situation où le nombre de morts n'arrête pas. Les urgences absolues deviennent des urgences dépassées.

"Nos collègues sont eux-mêmes en situation de danger parce que leur structure peut être bombardée à tout moment."

Dr Raphaël Pitti

à franceinfo

Sans couloir humanitaire, les civils sont dans des situations de stress épouvantables. Ils sont cachés dans les caves. Ils sont terrés. Il n'y a pas d'eau ou pas d'électricité, ou très peu, et surtout pas d'alimentation. C'est la méthode utilisée par les Russes en Syrie ou en Tchétchénie.

Que pensez-vous de la réponse occidentale vis-à-vis de la Russie, depuis le début de cette guerre ?

Il y a une lâcheté occidentale à ne pas aller jusqu'au bout de leurs convictions. Ce n'est pas simplement une guerre entre l'Ukraine et Poutine, c'est vraiment une guerre de civilisation. Il y a deux conceptions dans le monde : la conception démocratique avec le respect de la dignité humaine et le respect des droits de l'Homme et de l'autre côté il y a des systèmes autoritaires qui écrasent l'individu, qui écrasent la société. En Syrie, c'est ce que Vladimir Poutine a fait en maintenant Bachar al-Assad au pouvoir. Nous devons combattre Vladimir Poutine partout où il est parce que ce sont deux concepts de civilisation totalement différents. Nous avons à défendre nos valeurs et notre civilisation.

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