: Reportage "Ça me réchauffe le cœur de faire ce travail" : à Ukrainsk, dans le Donbass, un secouriste bénévole évacue les derniers civils ukrainiens
L'Ukraine contrôle désormais près de 1 300 km² de territoire russe dans la région de Koursk. Mais cela ne doit pas faire oublier que les forces de Kiev reculent actuellement dans le Donbass, et notamment près de la ville de Pokrovsk. L'armée russe n'est qu'à dix kilomètres de cette ville stratégique. Elle n'est même qu'à quatre kilomètres de la petite ville d'Ukrainsk, qui est en périphérie de Pokrovsk. Franceinfo a pu suivre mardi 27 août un secouriste bénévole, chargé d'évacuer les derniers civils qui vivent encore sous les bombardements russes.
Dans la ville, les habitants se terrent. Dans les rues, on n'entend que le bruit des frappes et la grosse voix de Vlad, le secouriste en charge de l'évacuation. "On est au numéro 10 ici ? C'est pour vous l'évacuation ? Allez, on y va !", lance-t-il. "Là maintenant ?, lui répond Olga, une habitante. Est-ce qu'on a au moins une heure [pour se préparer] ?" "Non, vous n'avez pas une heure. On y va !", lui répond le secouriste.
Olga remonte chez elle en vitesse, son fils Yura est sur le palier avec deux gros sacs. "Deux sacs de vêtements, c'est tout ce qu'on prend, poursuit Olga. Et si je peux, mon chien. C'est de plus en plus effrayant ici, raconte-t-elle. Ma mère me dit : 'On ne passera pas une nuit de plus dans cet endroit'."
"À l'entrée de l'immeuble, il y a un cadavre. Qui va s'en occuper ?"
Yura, habitant d'Ukrainskà franceinfo
Dans la cour, Vlad le secouriste s'impatiente. "Bougez-vous !", lâche-t-il. "On arrive, on arrive", répondent la mère et le fils qui dévalent l'escalier, récupèrent le chien au fond du jardin et passent devant le cadavre de leur voisin tué par une frappe.
Il faut faire vite, toujours plus vite. Vlad, près de sa camionnette, s'énerve : "Yura, purée... Cours plus vite ! C’est bon ? On démarre ?" Quelques mètres plus loin, un jeune homme attend à un arrêt de bus délabré. Vlad l'embarque, ni une ni deux.
Accro à l'adrénaline
Dans la rue principale, une petite dizaine de personnes attendent. Vlad en prend deux de plus. Les échanges d'artillerie sont incessants, la camionnette de Vlad est pleine, un jeune s'approche. "Mon père est malade, il est presque immobile. Que peut-on faire ?", demande-t-il. "On peut le prendre !, répond le secouriste. On va mettre son fauteuil roulant dans le coffre. Je reviendrai demain ici vers 10 heures. À demain !"
Puis c'est une vieille dame qui chuchote à Vlad : "Combien ça coûte à peu près le voyage ? Mais nous, on évacue les gens gratuitement ! Il n’y a pas d'arnaque !", lance Vlad. Désormais, il faut filer, la camionnette du secouriste fonce à tombeau ouvert vers Pokrovsk et le centre de réfugiés. Olga peut enfin souffler.
"C'est un vrai soulagement. Je vais enfin pouvoir dormir. Je ne sais même pas comment les remercier. Merci beaucoup."
Olga, une habitante évacuéeà franceinfo
Quant à Vlad, il a le sourire. Tout s'est bien passé, selon lui : "Ça me réchauffe le cœur de faire ce travail, se confie-t-il. Et peut-être aussi que je suis accro à l'adrénaline." Tellement accro qu'il effectue ces missions de sauvetage tous les jours ici, et depuis des mois.
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