: Reportage Guerre en Ukraine : "la paperasse", l'autre combat des soldats de retour du front pour obtenir les aides auxquelles ils ont droit
Devant un hôpital militaire à Kiev, Vyatcheslav, la trentaine, est assis sur son fauteuil roulant. Il y a deux mois, il a sauté sur une mine à Bakhmout et il a perdu sa jambe. Il n'y a pas de chiffre officiel, mais d’après les estimations, ils sont plusieurs dizaines de milliers de soldats, comme Vyatcheslav, à avoir perdu une jambe, un bras ou un œil sur le front. Pour ces soldats mutilés de guerre, c'est la double peine. En plus de devoir vivre avec un handicap, ils doivent aussi lutter pour bénéficier des allocations et des soins auxquels ils ont droit.
>> Espagne : une entreprise de sécurité privée propose une formation pour aller combattre en Ukraine
Beaucoup se sentent abandonnés par l’État pour lequel ils se sont pourtant sacrifiés. Aujourd'hui, Vyatcheslav doit surmonter de nouveaux obstacles. "Mon plus gros problème, c’est la paperasse. Mes amis m’ont aidé à trouver un avocat qui m’a expliqué clairement les démarches à faire. Parce que quand je remplis un formulaire, chaque mot peut avoir une incidence dans l’obtention ou non de ma prothèse et d’une aide financière à l’avenir", raconte-t-il.
Viatcheslav doit se battre contre l’administration, contre "la bureaucratie", dénonce-t-il. Pour obtenir une prothèse payée par l’État, il doit collecter une série de certificats prouvant qu’il a bien été blessé au combat. En parallèle, le jeune homme essaie de bénéficier d’une prime allouée aux grands blessés de guerre : "Selon nos lois, l’État doit nous verser une prime pendant les quatre premiers mois après notre blessure, mais il traîne, l’État ne paie pas. Il trouve des prétextes".
"Au final, ces 2 500 euros de prime, la plupart des gars ne les touchent pas. C’est triste."
Vyatcheslav, soldat mutilé de guerreà franceinfo
Le parcours du combattant ne s’arrête pas là. Pour pouvoir quitter définitivement l’armée, les mutilés doivent passer devant deux commissions et là encore, fournir des papiers. C'est une aberration pour Maci Nayem, qui est lui aussi un mutilé de guerre. Cet avocat de formation a créé une association de défense des droits des soldats : Princip.
Selon lui, il y a une mesure simple à prendre d’urgence pour les blessés de guerre. "Moi, par exemple, en tant que militaire blessé, je suis comme un facteur, explique Maci Nayem, obligé de livrer des documents d’un endroit à un autre. Alors, j'ai conclu que pour échanger des documents, il faut une base de données numériques. C’est simple à comprendre ! Mais dans l’armée, personne n’utilise la numérisation des documents. Alors, pour que les gars n’aient pas à faire des va-et-vient avec leurs papiers, il faut investir dans des ordinateurs et installer un logiciel sécurisé".
Par ailleurs, grâce à son travail de pression auprès des élus, l’association Princip vient de faire voter une loi pour augmenter l’allocation mensuelle versée à vie aux mutilés de guerre. Elle vient de passer de 25 à 500 euros.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.