Reportage "Vivre près de la frontière, c'est être plongé dans la peur" : en Ukraine, les zones proches de la Russie sont désertées par leurs habitants

Pas de répit pour les villages ukrainiens frontaliers avec la Russie, depuis le début de la guerre. Les habitants, qui comptaient des amis parmi leurs voisins russes, ont, pour la plupart, déserté.
Article rédigé par Vanessa Descouraux, Jérémy Tuil - Yachar Fazylov
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Un tank ukrainien dans la région de Donetsk, avril 2021 (photo d'illustration). (ARMED FORCES OF UKRAINE/HANDOUT / ANADOLU AGENCY)

En Ukraine, les attaques venues du ciel se poursuivent par drones ou missiles. C'était le cas encore, mardi 30 janvier, sur la grande ville du nord, Kharkiv, distante de 50 km seulement de la frontière. Ces zones frontalières n’ont connu aucun répit depuis les presque 2 ans de guerre.

Dans la région de Soumy, le village de Riasne est l’un des derniers encore habités. La maire, Valentina Moroz, 55 ans, première femme élue à la tête de la commune, présente ce qui fut la fierté du village. Une bibliothèque spacieuse, aujourd'hui détruite par un tir de mortier russe tombé juste à côté. La Russie est à trois kilomètres.

"À chaque instant, on peut être ciblés"

Au premier étage, Valentina Moroz nous montre la frontière russe. Une ligne droite de camps qui ne sont plus cultivés, un décor rectiligne, des bosquets et la Russie : "On allait à pied, on traversait juste le fossé pour voir nos amis. On y allait pour les anniversaires, on y faisait des fêtes, on rentrait. On avait une vie normale, tranquille... Là, de ce côté de la frontière, il y a même un village ou il y a la maison en Ukraine et le potager en Russie."

Avant l'occupation le village de Riasné comptait 504 habitants. Aujourd'hui, ils ne sont plus qu'à peine plus de 200. Mais Valentina n'a pas perdu que des administrés, des amis également russes, de l'autre côté de la frontière. 

"Ils m'ont dit qu'ils ne savaient rien, mais je ne les crois pas. Parce qu'on connaît l'endroit où vivent nos amis et c'est dans ce village que la Russie a amassé ses troupes. Nos amis, ils ont forcément vu et compris ce qui allait arriver. Jamais on ne leur pardonnera."

Valentina Moroz

à franceinfo

Le village a été occupé pendant un mois. Les soldats russes sont partis aussi vite qu'ils se sont installés. L'avancée des forces ukrainiennes les a fait fuir dans la précipitation, mais cette frontière, juste à côté, reste, depuis, une menace pour Valentina Moroz : "Vivre près de la frontière, c'est être toujours plongé dans la peur. Il ne s'agit pas de vivre jour par jour mais de vivre chaque minute, chaque heure. Tu es déjà heureux d'être en vie parce que les frappes arrivent soudainement. Ça peut arriver la nuit, le jour... À chaque instant, on peut être ciblés."

Valentina refuse de quitter son village où elle vit seule désormais. Son mari s'est engagé dans l'armée. Il est mobilisé dans une ville frontalière avec la Biélorussie.

En Ukraine, les zones proches de la Russie sont désertées par leurs habitants - Vanessa Descouraux, Jérémy Tuil et Yachar Fazylov

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