Russie : un opposant condamné à sept ans de prison pour avoir dénoncé l'offensive contre l'Ukraine
En mars dernier, ce juriste de formation avait dénoncé la guerre menée en Ukraine par le Kremlin, lors d'une assemblée de quartier à Moscou. Or le terme "guerre" est prohibé pour qualifier "l'opération militaire spéciale", selon les termes autorisés.
Les mots ont un poids de plus en plus lourd en Russie. Un élu municipal moscovite, Alexeï Gorinov, a été condamné à sept ans de prison pour avoir dénoncé l'invasion russe en l'Ukraine, vendredi 8 juillet, en pleine vague répressive pour faire taire toute critique sur l'offensive décidée par Vladimir Poutine. "Tous les efforts de la société civile doivent servir à mettre fin à la guerre et à entraîner le retrait des forces russes du territoire ukrainien", avait-il notamment déclaré en mars dernier.
La juge a reconnu l'homme de 60 ans coupable d'avoir "disséminé des informations clairement mensongères" sur l'armée russe en usant de "ses fonctions officielles" et de l'avoir fait dans le cadre d'un groupe organisé motivé par la "haine politique". "Le redressement de l'accusé est impossible sans peine de privation de liberté", a estimé la magistrate avant de le condamner à sept ans de détention dans une colonie pénitentiaire. Avant qu'elle ne prononce cette peine, le public du procès a applaudi l'accusé, conduisant à l'expulsion de la salle des spectateurs venus le soutenir.
Peu avant la sentence, debout dans la cage de verre réservée à l'accusé, l'homme aux cheveux gris, le visage tendu et le regard perçant, a tenu devant les caméras une feuille barrée des mots : "Il vous la faut encore cette guerre ?". La veille, lors de son procès, Alexeï Gorinov avait martelé être "contre toutes les guerres", soulignant que son père était "revenu invalide de la Seconde Guerre mondiale". Il a aussi cité les noms de villes ukrainiennes comme Boutcha où les forces russes sont accusées de crimes de guerre, exactions que les autorités russes qualifient de mensonges ou de mises en scène.
Une série de lois pour censurer les opposants
Juriste de formation, Alexeï Gorinov avait été arrêté en avril pour avoir dénoncé le 15 mars la "guerre" et "l'agression" de Moscou contre l'Ukraine, pendant une réunion de son assemblée municipale de quartier. La session avait été filmée et retransmise sur YouTube, ce qui, pour le tribunal, constitue des circonstances aggravantes. L'une des collègues d'Alexeï Gorinov, Elena Kotenochkina, est accusée des mêmes faits, selon le site Mediazona (en russe), qui a assisté à l'audience. Mais elle n'est pas jugée car elle a fui la Russie, comme de nombreux militants depuis le début de la guerre.
Alexeï Gorinov est le premier opposant, un élu qui plus est, à écoper d'une peine de prison ferme pour ses prises de position contre l'intervention russe en Ukraine, mais d'autres militants attendent actuellement en détention leur procès. Depuis le 24 février, date de l'entrée des forces russes en Ukraine, les autorités ont adopté plusieurs lois pour punir de lourdes peines ceux qui réprouvent publiquement cette attaque, bannissant au passage l'emploi des mots "guerre" et "invasion". Lors du verdict, la juge a déclaré que les propos d'Alexeï Gorinov n'étaient pas conformes aux briefings officiels du ministère de la Défense.
Cette semaine, la chambre basse du Parlement a voté une série de textes au langage très vague pour réprimer, par de lourdes peines de prison, les appels à agir contre sa sécurité ou encore la coopération "confidentielle" avec des étrangers.
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