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Témoignage Guerre en Ukraine : les Russes "ne veulent pas qu'ils en sortent vivants", le père d'un soldat réfractaire raconte l'enfer des prisons russes

Selon deux unités présentes dans le Donbass, l'armée russe compterait plus de 378 soldats refusant de continuer à se battre en Ukraine. L'un deux, emprisonné puis enrôlé chez Wagner, a réussi à joindre son père par téléphone.

Article rédigé par Eric Biegala - Denis Kataev
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Un soldat russe dans la région de Kherson, en Ukraine, le 23 mai 2022.  (RIA NOVOSTI / SPUTNIK / AFP)

Il a jeté l'éponge et refusé de combattre plus longtemps. À 26 ans, Youri est militaire dans une unité basée à Sakhaline, dans l'Extrême-Orient russe. Son bataillon est engagé en Ukraine et a participé à la bataille d'Izioum, du 7 mars au 1er avril. Deux mois plus tard, en juin, le soldat russe conteste et ne veut plus se battre. Il est alors immédiatement mis aux arrêts, avec d'autres soldats tout aussi réfractaires, et incarcéré dans une prison dans la région de Louhansk.

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Un jour, il parvient à joindre son père par téléphone. "Mon fils m'a parlé de tortures, il a dit qu'ils étaient torturés. Je l'avais déjà compris en parlant avec les parents d'autres militaires", raconte Maxime, 50 ans, à franceinfo.

Selon ce qu'a rapporté Youri, les réfractaires sont régulièrement battus, ligotés à même le sol. Il y aurait même eu des simulacres d'exécution. Ils seraient finalement transférés, un par un. "Ils sont exfiltrés vers des destinations inconnues, assure le père du soldat. Pourquoi ? Pour qu'ils ne puissent rien raconter de ce qui s'est passé dans les prisons." 

"Ils ne sont pas renvoyés dans les unités où ils servaient auparavant mais dans des unités spéciales, dans des zones du front où l'armée subit le plus de pertes. Je crois qu'ils ne veulent pas qu'ils en sortent vivants."

Maxime, père d'un soldat réfractaire

à franceinfo

Les avancées de l'armée russe dans le Donbass sont lentes et coûteuses. Les unités peinent à recruter des combattants, d'autant que désertions et refus de combattre semblent se multiplier dans les rangs. Pour son père, Youri a été emmené à la prison de Perevalsk, à côté de Louhansk. "Puis les hommes du groupe Wagner ont dit qu'ils avaient besoin de lui, rapporte Maxime. Il ne pouvait pas refuser, alors il est parti."

Plus de 378 soldats réfractaires

Le père de Youri a fait le trajet jusqu'en Ukraine pour tenter de retrouver son fils. Sans grand espoir. "J'ai trouvé le contact de l'un des commandants militaires. J'irai le voir demain pour lui parler, mais j'imagine ce qu'il va me répondre car je ne suis pas la première personne à le rencontrer", souffle Maxime. 

Combien sont-ils ces réfractaires de l'armée russe ? Plusieurs centaines, peut-être plusieurs milliers. En juin et juillet, deux unités présentes dans le Donbass ukrainien, la 205e brigade de fusiliers motorisés et la 11e brigade d'assaut aéroportée, ont fait état de plus de 378 soldats réfractaires, refusant de continuer à se battre en Ukraine.

Guerre en Ukraine : le père d'un soldat réfractaire raconte l'enfer des prisons russes. Reportage de Denis Kataev et Eric Biegala.

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