Ukraine : "Cette guerre est dévastatrice" pour le chef de la milice Wagner, "il veut vraiment se retirer", analyse l'ex-chef d’état-major de l’armée de l’air
Pour Evguéni Prigojine "cette guerre est dévastatrice, il est en train de perdre des hommes de qualité" et "de l'argent", a expliqué dimanche 7 mai sur franceinfo le général Jean-Paul Paloméros, ancien chef d’état-major de l’armée de l’air et commandant de l’Otan à la transformation des capacités militaires. Le chef de la milice Wagner a protesté contre un manque de munitions. Il a demandé samedi au ministre russe de la Défense de confier aux troupes du dirigeant tchétchène, Ramzan Kadyrov, ses positions à Bakhmout, dans l'est de l'Ukraine.
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"Il est en train de négocier son retrait. C'est aussi simple que ça. Il veut vraiment se retirer", analyse le général. Par ailleurs, il estime que la milice Wagner "n'est pas une armée pour une guerre de haute intensité comme celle qui se déroule en ce moment en Ukraine".
franceinfo : Pensez-vous que Evguéni Prigojine souhaite se retirer d'Ukraine ?
Jean-Paul Paloméros : Monsieur Prigojine est avant tout une sorte de chef d'entreprise. Il est en train de se rendre compte que cette guerre, qui n'est pas vraiment la sienne, lui coûte cher en hommes et en argent. Il veut vraiment se retirer. Toutes les excuses sont bonnes, y compris les munitions. Évidemment, Moscou ne veut pas porter la responsabilité. Mais il est clair que maintenant, Prigojine pense et dit que ça suffit. Il veut retourner à ce qu'il fait dans les pays africains où il se paye directement sur les ressources de ces pays. Cette guerre, pour lui, est dévastatrice. Il est en train de perdre des hommes de qualité, il est en train de perdre de l'argent, donc ce n'est pas du tout une bonne affaire.
A-t-il envie de retirer ses troupes avant la contre-offensive annoncée de l'Ukraine ?
Il sent aussi qu'il y a cette pression. Il ne veut pas porter en aucun cas le prix de la défaite sur ses épaules. Il cherche tout alibi. Les munitions sont sans doute un bon alibi. Je suis à peu près certain qu'il est sur la voie du retrait pour toutes les bonnes ou mauvaises raisons qu'il pourra invoquer. Il est en train de négocier son retrait. C'est aussi simple que ça.
Evguéni Prigojine concentre ses critiques sur le ministre de Défense et épargne Vladimir Poutine. Il a peur d'aller trop loin ?
Il est proche de Monsieur Poutine. On sait très bien que Wagner, c'est une milice masquée qui agit pour l'État et pour son compte. C'est une sorte d'être hybride en quelque sorte.
"Il ne peut pas s'en prendre au pouvoir qui l'a mis sur un piédestal."
Général Jean-Paul Palomérosà franceinfo
Wagner ne peut pas gagner tout seul. Wagner n'est pas une armée en tant que telle, c'est une milice. Ça va très bien éventuellement pour certaines parties en Afrique, mais Wagner n'est pas une armée pour une guerre de haute intensité comme celle qui se déroule en ce moment en Ukraine.
Quel rôle a joué la milice Wagner dans le conflit ukrainien ?
C'était au départ pour monsieur Prigojine une formidable publicité où il a voulu démontrer - c'est une question d'ego - que sa milice pouvait réussir là où la grande armée russe ne fonctionnait pas pour des tas de raisons. Il n'avait pas complètement tort sur l'analyse des problèmes. Mais ce qu'il a oublié, c'est que Wagner n'est pas une armée en tant que telle. Elle peut gagner des batailles très partielles. Même celle de Bakhmout, elle ne pouvait pas la gagner toute seule. Les miliciens de Wagner sont des mercenaires aguerris. Il les forme, il va les chercher dans les forces armées. Ils sont évidemment beaucoup mieux payés que les militaires classiques. C'est toujours une force d'appoint, mais ça ne peut pas être une force en soi et seule.
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