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"Le gouvernement veut contrôler l'utilisation de cet argent" : les demandeurs d'asile ne peuvent plus retirer leur allocation en liquide

L'allocation pour demandeurs d'asile (ADA) sera désormais versée via une carte de paiement uniquement. Jusqu'ici, les demandeurs d'asile pouvaient bénéficier d'une carte de retrait. Pour les associations, cette mesure va davantage précariser la vie quotidienne des demandeurs d'asile. 

Article rédigé par Sandrine Etoa-Andegue
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Une carte pour l'allocation de demandeur d'asile (ADA). (DR)

Les demandeurs d'asile ne recevront plus d'argent liquide. Jusqu'à présent l'ADA, l'allocation pour demandeurs d'asile était versée tous les mois via une carte de retrait bancaire, le temps que la décision définitive sur leur demande leur soit notifiée. Une personne seule hébergée pouvant ainsi bénéficier de 6,80 euros par jour soit 204 euros par mois, 14,20 euros pour une personne seule non-hébergée (426 euros par mois). Une somme que le demandeur d'asile pouvait retirer et utiliser pour les dépenses du quotidien.

Mais à partir du mardi 5 novembre, sur décision du ministère de l'Intérieur, cette carte d'allocation ne sera plus une carte de retrait d'argent liquide, mais une carte de paiement uniquement. Une décision prise par le ministère de l'Intérieur au creux de l'été qui fait bondir les associations. Ces dernières estiment que cette mesure restreint les droits fondamentaux des demandeurs d'asile.

"La pression des gangs de passeurs"

L'objectif, explique le gouvernement, c'est que cette allocation ne soit pas détournée. Pour Didier Leschi, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (l'OFII), ce changement est ainsi une mesure de protection pour les demandeurs d'asile. "Il y a une partie des demandeurs d'asile qui sont victimes de la pression de gangs de passeurs organisés pour qu'ils remboursent le 'service' fourni par le passeur pour qu'ils arrivent jusqu'ici. Et nous pensons que la carte de paiement permettra de limiter ces pressions sur les personnes et au contraire, qu'elles pourront utiliser très directement l'allocation pour demandeurs d'asile, c'est-à-dire subvenir à leurs besoins."

Nourriture, transports, parfois hébergement : ce manque d'argent liquide va compliquer une vie quotidienne déjà très précaire, dénoncent les associations d'aide aux migrants. Pour Ehsan, un jeune demandeur d'asile kurde iranien de 25 ans, "le gouvernement veut contrôler l'utilisation de cet argent par les demandeurs d'asile et décourager les autres de venir en France".

La députée LREM du Bas-Rhin Martine Wonner défend la lutte contre les filières mafieuses mais n'approuve pas cette mesure : "Nous ne considérons pas du tout de la même façon que le gouvernement que 100% des demandeurs d'asile soient des fraudeurs en puissance. Il me semble qu'on peut lutter contre des dévoiements d'une autre façon."  80 associations demandent l'annulation pure et simple de cette mesure. En 2018, 130 000 personnes ont bénéficié de l'aide pour demandeurs d'asile selon l'OFII.

Le reportage de Sandrine Etoa-Andegue.

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