Migrants à Paris : après le cri d'alarme de MSF, le centre d'accueil de la porte de la Chapelle a retrouvé un "calme relatif"
Samedi, l'ONG Médecins sans frontières affirmait dans un communiqué que des "policiers intervenaient la nuit pour retirer des couvertures aux migrants qui sont dans la rue".
Lundi 9 janvier, à Paris. A la porte de La Chapelle, c'est le calme après la tempête. Une quinzaine de migrants attend de pouvoir intégrer le centre humanitaire qui a ouvert ses portes en novembre. Certains portent des couvertures sur leurs épaules. Destiné à accueillir temporairement les hommes seuls et à les aiguiller dans leurs démarches, le centre, d'une capacité de 400 places, a vocation à éviter les campements sauvages au sein de la capitale.
Des barrières sont dressées pour réguler la file d'attente ; sur le côté, des blocs de pierre ont été installés pour dissuader tout campement tandis que quatre camions de CRS encadrent les grilles du centre. Car les entrées se font au compte-gouttes et le centre peut être rapidement saturé. Résultat : il n'est pas rare de voir des migrants s'asseoir ou dormir devant la structure d'accueil, en attendant que les places se libèrent.
Une situation qui force MSF à communiquer
Une situation qui semble irriter les autorités puisqu'à plusieurs reprises les forces de l'ordre ont tenté d'évacuer les personnes qui s'étaient installées à proximité, "en leur confisquant leurs couvertures, utilisant parfois des gaz lacrymogènes pour les disperser, allant jusqu’à leur interdire de s’asseoir dans la file d’attente", déplorait l'association Médecins sans frontières (MSF), dans un communiqué publié samedi 7 janvier.
Alors que les températures sont devenues négatives, les violences policières se multiplient depuis une dizaine de jours, notamment dans les quartiers de la Chapelle et de Pajol : les forces de l’ordre réveillent les migrants en pleine nuit et leur confisquent leurs couvertures.
Médecins sans frontièresdans un communiqué
Les faits ont été constatés dans la semaine entre Noël et le jour de l'an, "quasiment quotidiennement, vers 3 heures, 4 heures, 5 heures du matin...", explique à franceinfo Corinne Torre, coordinatrice de programmes à MSF. "Pour être sûrs d'intégrer le centre qui ouvre à 8 heures, les gens s'agglutinent à partir de 4 heures du matin et ils dorment parfois sur place", poursuit Corrinne Torre.
Alerté par des collectifs citoyens d'opérations policières la nuit, MSF a été sollicité pour fournir des couvertures après leur confiscation par les forces de l'ordre. Après avoir récolté des témoignages de migrants et organisé des maraudes piétonnes, MSF s'est vu confirmer "les violences policières". "Sans parler des huit cas de personnes proches de l'hypothermie", ajoute Corrinne Torre. Cette situation "pousse" donc l'ONG à communiquer.
Bruno Le Roux défend les forces de l'ordre
Interrogé dimanche sur le "harcèlement" et les "violences" contre les migrants reprochés aux policiers à Paris, le ministre de l'Intérieur a défendu le travail des forces de l'ordre. "Il faut arrêter ce sport national de mise en cause des policiers, a lancé Bruno Le Roux sur RTL. Ce que font aujourd'hui les forces de police, c'est de la mise à l'abri de personnes qui sont vulnérables." Et le ministre de concéder : "C'est vrai, quelquefois, il peut y avoir une forme de contrainte à mettre à l'abri quelqu'un."
De son côté, Luc Poignant, du syndicat SGP-Police, explique à BFMTV : "Quand on évacue quelqu'un, on évacue également l'ensemble de ses effets. Si on ne veut pas qu'ils reviennent – et c'est le but recherché par la municipalité –, à ce moment-là, il faut l'évacuation aussi de leurs effets personnels." Alertée, la mairie de Paris "condamne et renvoie la balle vers la préfecture de police de Paris", selon Médecins sans frontières.
La tension est retombée
Porte de La Chapelle, les migrants qui ont été délogés par les forces de l'ordre ont disparu, intégrés au centre et aiguillés vers d'autres établissements. Mais il n'est pas difficile de trouver des témoignages attestant de confiscations de couvertures et d'usage de gaz lacrymogène. Mais ce lundi, la situation est calme et parfaitement maîtrisée.
Depuis la publication de notre communiqué, c'est très surprenant, c'est extrêmement calme. Il y a sûrement eu des instructions. Et tant mieux : c'était le but de notre communication.
Corinne Torre
Pour autant, l'ONG promet de "rester sur le qui-vive". "On était en face de mises en danger réelles pour la vie des migrants, précise Corinne Torre. Désormais on s'attend à un calme relatif, mais il ne faut pas croire que ce genre de pratiques policières va disparaître."
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