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Retour sur les dix jours où l'Europe a vécu sans avion

L'information tombe le 14 avril peu avant 13h: une éruption s'est déclenchée dans la partie sud-ouest du cratère au sommet de l'Eyjafjallajokull. La fumée qui commence à s'échapper de ce cratère va marquer l'histoire de l'aéronautique et des transports en Europe.
Article rédigé par franceinfo
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Mercredi 14 avril : un volcan entre en éruption

Le volcan Eyjafjöll entre en éruption en Islande et fait fondre une partie du glacier d'Eyjafjallajokull qui l'environne. On craint des inondations sur l'île et 800 personnes sont évacuées. Deuxième problème : un nuage de cendres se dégage du cratère et entraîne des problèmes de visibilité pour les avions. Ce qui incite la Norvège à être le premier pays à fermer une partie de son espace aérien.

Jeudi 15 avril : le nuage se propage

Le nuage de cendres se propage à toute l'Europe. Les services météo lancent l'alerte et des restrictions de navigation sont imposées par les services de contrôle aérien. On apprend que le nuage ne gène pas seulement la visibilité mais qu'il pourrait se révéler dangereux pour les réacteurs des appareils. Une grande partie du trafic aérien d'Europe du Nord est suspendu jusqu'à nouvel ordre. On évoque alors deux jours de perturbations.

Le nuage de cendres volcaniques diminue en effet l'arrivée d'air dans les moteurs et est particulièrement abrasif. Ensuite, il contient des particules riches en silice qui peuvent fondre au contact du réacteur puis se solidifier au passage de la turbine (plus froide), ce qui peut bloquer le moteur.

Michel Polacco, spécialiste des questions aéronautiques à France Info, explique alors qu'il y a déjà eu trois graves précédents. En 1982, un Boeing 747, volant au dessus de l'Indonésie, traverse un nuage de cendres volcanique issu de l'éruption du volcan Galungung. Ses réacteurs s'arrêtent pendant près de 13 minutes. Il arrivera finalement à se poser.

Vendredi 16 avril : un nouveau 11 septembre

L'OMS indique que des pluies de cendres pourraient être nocives pour les hommes. En deux jours, près de 23 000 vols ont été annulés. Le trafic aérien mondial n'a jamais été autant perturbé depuis les attentats du 11 septembre 2001. Près de la moitié des vols prévus en Europe sont annulés même si certains espaces aériens rouvrent temporairement, en fonction du déplacement du nuage de cendres.

Eurocontrol, l’Organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne, parle d'encore deux jours de perturbations. Mais des experts en Islande avertissent déjà que l’éruption pourrait durer des semaines

samedi et dimanche 17-18 avril : week-end noir

La fermeture des espaces aériens est régulièrement prolongée. De nombreux passagers tentent de contourner le problème en voiture, en train ou en se rendant vers le sud de l'Europe. 50.000 Français sont toujours bloqués à l'étranger. L'association internationale du transport aérien estime que la paralysie du trafic coûte 150 millions d’euros par jour aux compagnies aériennes.

Afin de vérifier la dangerosité du nuage pour les réacteurs, des premiers vols d’essai sans passager sont organisés par les compagnies aériennes KLM et Lufthansa. Pas d'incidents à signaler. Le principe de précaution commence à être contesté. D'autant que les instruments météorologiques ne mesurent pas la concentration de particules volcaniques dans l'air.

Un peu partout en Europe, on autorise la reprise très progressive des vols.

Lundi 19 avril : trop de précautions ?

L'activité du volcan semble faiblir et, après les vols tests effectués par les compagnies aériennes le week-end, les autorités européennes lèvent l'interdiction de circulation qui pesaient sur certains pays. C'est le cas notamment de la France. Les vols reprennent bien qu'une normalisation du trafic ne soit pas attendue avant jeudi.

En tout, ce sont près de 7 millions de passagers qui attendent leur avion. Entre 50.000 et 150.000 Français seraient bloqués à l'étranger. Les pertes financières pour les compagnies aériennes sont déjà plus importantes qu'après le 11 septembre. Le secteur du tourisme est également touché.

La colère gronde du côté des professionnels. Un porte-parole de Lufthansa explique qu'il n'y aurait pas de cendres volcaniques jusqu’à 8.000 mètres.

Mardi 20 avril : L'UE débloque le ciel

La présidence de l'Union européenne annonce une reprise progressive du trafic. L'UE établit trois zones géographiques : une zone de restrictions “absolues” près du volcan, une seconde où elles seront levées mais où la situation évoluera en fonction des relevés scientifiques, et une troisième “ne nécessitant aucune restriction d’aucun type”. Dans la journée, entre 55 et 60% des vols sont assurés dans le ciel européen, selon Eurocontrol.

Mais une mauvaise nouvelle vient à nouveau assombrir le ciel européen. Les autorités aéronautiques britanniques annonce une intensification de l’éruption du volcan et estime qu’un nouveau nuage de cendres se dirige vers la Grande-Bretagne. Les scientifiques islandais, eux, n'y croient pas vraiment, ce qui finit de semer la confusion.

Des millions de passagers attendent toujours leurs vols, dont au moins 85.000 Français.

D'autres secteurs de l'économie commencent à être touchés. Mais tout le monde n'est pas perdant.

Mercredi 21 avril : le volcan s'éteint

Malgré les incertitudes pesant sur l'activité du volcan, le trafic reprend de façon quasi-normale. 75% des vols sont assurés en Europe.

Les sismologues islandais estiment que l'activité du volcan a chuté de près de 80% depuis samedi et la production de cendres est devenue “insignifiante”. Mais ils craignent désormais l'éruption d'un autre volcan, à quelques kilomètres de là.

Samedi 26 avril : encore 10 000 Français sans avion

Le trafic est redevenu normal. Mais près de 10 000 Français attendent toujours d'être rapatriés.

Dimanche 25 avril : moins de 3.000 Français encore bloqués
Le ministre de l'Environnement Jean-Louis Borloo avait promis vendredi
assuré que "l“es compagnies françaises auront rapatrié tous leurs
clients dès la fin de semaine”. Le nuage lui reste localisé sur l'Islande. Pour le moment?

Jean-Louis Dell'Oro

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