Alexis Tsipras, du Parti communiste au poste de Premier ministre
Tsipras peut avoir le sourire. Sa victoire résume en quelque sorte l'histoire de la Grèce depuis le retour de la démocratie. Il est né en effet en même temps que la Grèce revenait à la démocratie après la dictature des colonels. Il a vu le jour à Athènes en juillet 1974, dans une famille d'entrepreneurs, quelques jours après la chute de la junte. Et il a fait ses études d'ingénieur à l'Ecole polytechnique de la ville, qui fut à l’époque des colonels un haut lieu de contestation.
Depuis cette date, la vie politique grecque se résumait à une alternance entre deux partis, le Pasok à gauche, et la Nouvelle Démocratie à droite. 41 ans après le retour de la démocratie, Alexis Tsipras a mis fin à cette vie politique traditionnelle dont les aspects souvent claniques ont mis la Grèce à terre. Symbole de ce changement, plus aucun Papandréou – la lignée qui a dirigé la gauche grecque pendant trois générations – n'est élu au parlement d'Athènes. L'heure est donc à la nouveauté.
La nouveauté est donc personnalisée par un militant de toujours. Alexis Tsipras est apparu sur les écrans grecs dès l’âge de 17 ans dans le cadre d’un mouvement lycéen. Engagé, il a donné le prénom d’Orphée-Ernesto à un de ses fils en hommage au Che. Militant encore, il a rejoint les jeunesses comunistes grecques dans un pays qui a été marqué par une sanglante guerre civile après la guerre entre communistes et anti-communistes (aidés par les Anglais et les Américains). Son premier geste de Premier ministre a d'ailleurs été de rendre hommage à des résistants communistes fusillés en 1944 par les nazis, à Kesariani, à côté d'Athènes.
Il a ensuite rejoint le parti Synaspismos, un petit parti de gauche, qualifié d’eurocommuniste, dont le nom signifie «Coalition de la gauche, des mouvements et de l’écologie». Un parti qui a la différence du KKE (le PC officiel) s’est toujours montré pro-européen. Il a été le responsable des jeunes de ce parti de 1999 à 2003.
Le militant a su aussi manœuvrer. Dans ce milieu complexe de la gauche de la gauche, il a joué entre les courants. En 2008, Alexis Tsipras a pris la présidence de son parti qui s'est fondu dans Syriza, une coalition réunissant Synaspismos et d’autres petits partis venus de l’extrême-gauche. Aux législatives de 2009, il est devenu député. «Ce qui me frappe chez lui, c’est son sang-froid», analyse Pierre Laurent, le leader du PC français.
Le système électoral grec accordant une prime de 50 sièges au parti vainqueur des législatives, la coalition Syriza a eu la bonne idée de se transformer en parti politique, les coalitions ne pouvant bénéficier de cette prime indispensable dans un système proportionnel. L’idée était bonne. En 2012, Syriza a raté de peu le pouvoir, mais c'était pour mieux revenir.
Tsipras, à la tête de son parti de gauche, symbolise la lutte contre la politique d’austérité imposée par la troïka à la Grèce. Aux Européennes, son parti est arrivé en tête en Grèce, signe que la coalition Pasok-ND vit des moments difficiles.
Candidat de la gauche européenne (la gauche de la gauche) à la tête de la commission de Bruxelles, il a gagné une image internationale. Son combat contre la politique européenne rencontre un important écho en Europe du sud. En France, il est sur la même ligne que le Front de gauche. Il est soutenu par Podemos, la force qui monte en Espagne.
Avec sa victoire, il va devoir réunir ce qui a fait sa force. Son réalisme et sa capacité à faire rêver. Un mélange dont il aura besoin pour convaincre ses partenaires européens.
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