Témoignage "Les journalistes occidentaux sont accusés de chercher à dénigrer l’Inde", témoigne Sébastien Farcis, journaliste interdit d'exercer en Inde

Sébastien Farcis, correspondant de Radio France, est le cinquième journaliste étranger à qui l'Inde vient de refuser de renouveler son permis de travail.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Narendra Modi, lors d'un discours à New Delhi le 4 juin 2024. (YUKI SATO / YOMIURI)

C'est une voix familière de Radio France. Sébastien Farcis, correspondant en Inde de Radio France, RFI, Libération et des radios publiques belges et suisses a été contraint de quitter le pays après un refus de renouvellement de son permis de travail en mars dernier, à la veille des législatives indiennes, sans qu'aucune raison ne lui ait été fournie. Le cas de Sébastien Farcis est l'exemple de la dérive autoritaire d'un pays qui met aujourd'hui les médias sous contrôle.

Arrivé en Inde pour y travailler il y a treize ans, Sébastien Farcis a vu la liberté de la presse s'y dégrader fortement à partir de l'arrivée au pouvoir de Narendra Modi. "On a en tête l'abrogation très autoritaire de l'autonomie du Cachemire, la mise en place de la politique très hindouiste, de la répression des musulmans et l'arrestation de journalistes indiens et l'interdiction de travail progressive de nombreux journalistes étrangers", énumère-t-il. La presse étrangère devient alors une des cibles préférées des nationalistes hindous, électorat de Narendra Modi.

"On a vu cette répression s'accentuer avec cette idée que les pays occidentaux et les journalistes occidentaux chercheraient à dénigrer l'Inde car l'Inde est en train de s'élever sur la scène internationale. Il y aurait une sorte de complot pour empêcher que cela arrive."

Sébastien Farcis, journaliste

à franceinfo

Sébastien Farcis est le cinquième journaliste étranger à qui l'Inde vient de refuser de renouveler son permis de travail. Une interdiction de facto d'exercer son métier, et une forme d'avertissement qui l'a obligé en quelques jours à quitter le pays où il était résident permanent après avoir épousé une indienne. La situation est pire encore, assure-t-il, pour les journalistes indiens. Ces dernières années, sept journalistes ont été emprisonnés pour avoir travaillé sur des sujets sensibles. Sans procès ni mise en examen, accusés de sédition ou de soutien au terrorisme. Une répression qui accompagne la fin de la presse indépendante.

"Le gouvernement est proche de groupes très puissants, très riches, qui dépendent de contrats publics, donc qui travaillent main dans la main avec le gouvernement. Avec l'arrivée de Modi, ces groupes ont commencé à racheter les médias."

Sébastien Farcis, journaliste

à franceinfo

"Malheureusement, cela nous rappelle beaucoup ce qui est en train de se passer en France avec le rachat de médias par le groupe Bolloré qui, en fait, a le même profil. Des groupes industriels proches du pouvoir avec une certaine idéologie. Avec l'achat de la dernière chaîne de télévision indépendante en Inde on a senti vraiment la fin d'un certain journalisme, l'information est tuée dans l'œuf", développe Sébastien Farcis.

Journalistes trop indépendants chassés des grands médias, correspondants étrangers poussés à quitter le pays, l'Inde, hier considérée comme la plus grande démocratie du monde, occupe désormais la 159e place sur 180 dans le classement de Reporters sans frontières de la liberté de la presse.

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