Ce que l'on sait de l'arrestation d'une jeune Iranienne en sous-vêtements sur un campus universitaire de Téhéran

Cette étudiante a déambulé en culotte et soutien-gorge pour protester contre la manière dont elle avait été traitée par des miliciens affiliés aux Gardiens de la Révolution. Son arrestation a provoqué de nombreuses réactions, notamment en France.
Article rédigé par franceinfo
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Une jeune femme iranienne en sous-vêtements sur un campus à Téhéran, le 2 novembre 2024. (TWITTER)

Un courage inouï et un acte politique fort. Une étudiante iranienne a été filmée en train de déambuler en sous-vêtements sur le campus d'une université de Téhéran avant d'être arrêtée, samedi 2 novembre. Les images de cette jeune femme, dont l'identité n'a pas été confirmée, ont fait le tour des réseaux sociaux et l'objet de nombreuses réactions, notamment de plusieurs ONG, dont Amnesty international.

Cette nouvelle arrestation intervient près de deux ans après la mort, le 16 novembre 2022, de Mahsa Amini, une jeune Kurde iranienne de 22 ans arrêtée par la police des mœurs pour non-respect du code vestimentaire, qui avait déclenché un vaste mouvement de protestation dans tout le pays. Franceinfo résume ce que l'on sait de cette arrestation dont l'écho résonne bien au-delà des frontières du pays.

Une jeune femme en sous-vêtements arrêtée en pleine rue

La vidéo publiée par le site étudiant Amir Kabir montre une jeune femme marchant sur le campus de l'université Azad, dans la capitale iranienne. Elle est uniquement vêtue d'une culotte et d'un soutien-gorge. La vidéo ne montre pas comment, ni pourquoi la jeune femme se retrouve dans cette tenue. Selon Amir Kabir, elle a été harcelée par des membres de la force paramilitaire Basij, affiliée aux Gardiens de la révolution, qui lui reprochaient une tenue inappropriée, en l'occurrence sa manière de porter le voile. Ils l'auraient alors malmenée et auraient arraché ses vêtements. 

En guise de protestation, la jeune femme se serait dévêtue, selon le site étudiant. Elle a ensuite déambulé en sous-vêtements, les bras croisés, sur le campus pendant quelques minutes, comme le montre la vidéo, avant d'être emmenée de force dans une voiture par quatre membres des forces de sécurité du pays. Le site étudiant iranien évoque une blessure lors de son arrestation.

Dans un message sur le réseau social X, la branche iranienne de l'ONG Amnesty International a simplement affirmé que l'étudiante avait été arrêtée pour "avoir enlevé ses vêtements en signe de protestation contre l'application abusive du port obligatoire du voile". L'organisation réclame sa libération "immédiatement et sans condition". "Les allégations de coups et de violence sexuelle à son encontre pendant son arrestation doivent faire l'objet d'une enquête indépendante et impartiale", ajoute-t-elle.

L'université se défend en mettant en cause la santé mentale de l'étudiante

Amir Mahjoub, directeur général des relations publiques de l'université Azad, a évoqué l'incident dans une série de messages sur X. Il confirme qu'"après l'acte indécent d'une des étudiantes de l'université des sciences de recherche, la sécurité de l'université est intervenue et l'a remise au commissariat. La motivation et les raisons de l'action de cette étudiante sont en cours d'enquête". Il affirme qu'après examen médical, la jeune femme "subissait une forte pression mentale et souffrait de troubles mentaux". L'étudiante a été admise dans un hôpital psychiatrique, selon les informations du site Amir Kabir. 

Le responsable a également partagé une vidéo sur X d'un homme, le visage flouté, présenté comme le mari de la jeune femme. Il demande que la vidéo de l'étudiante ne soit plus partagée. "Elle est mère de deux enfants et ils ne peuvent pas vivre sans elle", déclare-t-il avant d'éclater en sanglots, sans que franceinfo ait pu établir dans quel contexte cette vidéo a été réalisée.

L'agence officielle iranienne Fars, qui a également fait état de la scène, assure que la jeune femme portait des vêtements "inappropriés" en classe et s'est "dévêtue" après avoir été rappelée à l'ordre. Selon des "témoins" cités par Fars, les agents ont parlé "calmement" à la jeune femme et n'ont pas agi de façon agressive. La loi islamique iranienne impose un code vestimentaire très strict aux femmes, qui doivent porter le foulard et des vêtements amples dissimulant leurs formes.

Une vague de réactions pour soutenir l'étudiante

Cette arrestation a suscité de nombreuses réactions de soutien et d'indignation. "Aujourd'hui, tout le monde est derrière cette jeune femme et revendique la dimension politique et collective de son acte", analyse pour France 2 Chowra Makareni, anthropologue spécialiste de la société iranienne.

En France, de nombreuses personnalités ont pris la défense de cette étudiante. La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a salué, sur le réseau social X, "un courage sans nom, la tête haute et les cheveux au vent face à l'obscurantisme". Le président du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, a lui évoqué un "courage inouï"

La sénatrice LR Valérie Boyer et la députée européenne Renew Nathalie Loiseau ont partagé le même dessin de cette jeune femme en sous-vêtements brisant un mur. "Si le courage avait un nom, il s'appellerait Ahou Daryaei", assure la première, reprenant l'une des identités qui a filtré, sans qu'on puisse la confirmer. "Comme beaucoup d'autres, j'admire son courage. Mais je mesure aussi son désespoir", avance la seconde.

De son côté, Sandrine Rousseau a également partagé un autre dessin représentant l'étudiante en soutien-gorge et culotte. La députée écologiste exprime son soutien "aux Iraniennes, aux Afghanes, à toutes celles qui subissent l'oppression. Notre corps, et tout ce que l'on met – ou pas – pour le vêtir, nous appartient".

Des personnalités du monde culturel comme l'humoriste Sophia Aram, l'essayiste Rachel Khan ou l'écrivain Kamel Daoud ont également témoigné de leur soutien. La première a salué "l'immense courage" de l'étudiante "face à la dictature islamique", qui "restera dans l'histoire". La deuxième a rendu hommage à "cette force qui éclaire notre lâcheté". Enfin, le lauréat du prix Goncourt 2024 a simplement partagé une photo de la jeune femme sur le campus.

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