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Iran : trois questions sur les Français retenus dans le pays

Paris appelle ses ressortissants à quitter l'Iran dans les plus brefs délais, en raison de risques de "détention arbitraire".

Article rédigé par Pierre-Louis Caron
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Un drapeau iranien brandi sur une place de Téhéran (Iran), le 10 février 2021. (MORTEZA NIKOUBAZL / NURPHOTO / AFP)

Paris demande leur "libération immédiate"Cinq Français sont actuellement "retenus" en Iran, a annoncé mardi 11 octobre la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, sur France Inter. La ministre a ainsi confirmé la présence d'un Français parmi les étrangers arrêtés par les autorités iraniennes en marge des manifestations qui secouent le pays depuis la mort de la jeune Mahsa Amini, le 16 septembre. Les quatre autres personnes sont retenues dans le pays depuis plusieurs mois. Franceinfo revient sur ces détentions qui créent la discorde entre Paris et Téhéran.

1Qui sont ces ressortissants français ?

Ces cinq citoyennes et citoyens français ont des profils très différents. La chercheuse franco-iranienne Fariba Adelkhah, 63 ans, détenue depuis juin 2019. Cette membre du Centre d'études des relations internationales (CERI) de Sciences Po Paris, spécialiste du chiisme et de l'Iran post-révolution, avait été arrêtée aux côtés d'un autre chercheur français, Roland Marchal, libéré dix mois plus tard

Benjamin Brière, 37 ans, figure aussi sur cette liste. Ce dernier a été arrêté en mai 2020 alors qu'il effectuait un séjour touristique. Officiellement, ce passionné de voyages a été arrêté pour avoir pris "des photographies de zones interdites" avec un drone de loisir dans un parc naturel. Plus récemment, ce sont deux membres du syndicat français Force Ouvrière, Cécile Kohler et Jacques Paris, âgés de 37 et de 69 ans, qui ont été arrêtés en mai 2021 lors d'un voyage touristique.

Enfin, l'identité du cinquième ressortissant français retenu en Iran n'a pas été communiquée par le quai d'Orsay, qui assure toutefois avoir "pris contact" avec la famille de cette personne.

2Ont-ils été jugés ou condamnés à des peines ?

Presque tous les Français détenus en Iran ont fait l'objet d'un procès assorti de condamnations. Officiellement, la chercheuse Fariba Adelkhah purge une peine de cinq ans de réclusion pour "collusion en vue d'attenter à la sûreté nationale". Le blogueur Benjamin Brière été condamné à huit ans de prison pour "espionnage" ainsi qu'à huit mois de détention supplémentaire pour "propagande". 

Dans le cas des syndicalistes Cécile Kohler et Jacques Paris, arrêtés pour "atteintes à la sûreté", le procès se fait attendre. Mais la télévision d'Etat iranienne a récemment diffusé des extraits d'interviews controversés dans lesquelles les deux Français semblent avouer des actes d'espionnage et des projets violents. "Je suis agent de renseignement et opérationnelle (sic) de la DGSE (direction générale de la sécurité extérieure, les services secrets", y déclare notamment une jeune femme présentée comme étant Cécile Kohler, avant d'évoquer le financement de grèves et d'une lutte armée en Iran. 

Les raisons de l'arrestation du cinquième citoyen français restent un mystère. Le ministère des Affaires étrangères n'a pour l'instant fourni aucune indication sur cette affaire, mais il pourrait s'agir de l'un des neuf Européens arrêtés en Iran fin septembre pour leur implication supposée dans des manifestations anti-régime. Comme l'a relevé la BBC (en anglais), les médias iraniens évoquaient alors l'arrestation d'"espions de l'étranger" originaires de Pologne, de Suède, des Pays-Bas, mais aussi de France – sans toutefois préciser le nombre de ressortissants par pays. 

3Comment la France réagit-elle ?

Depuis le début de ces affaires, Paris soutient ces Français et réclame leur libération. La condamnation de Fariba Adelkhah, par exemple, a été vertement critiquée par les autorités françaises. "Cette incarcération ne repose sur absolument aucun élément. Il s'agit bien d'une prisonnière scientifique", déclarait encore Emmanuel Macron le 13 janvier dernier, lors d'un discours devant les présidents d'université à Paris. 

Deux semaines plus tard, lors d'un échange téléphonique avec son homologue iranien, le président français faisait part de sa "préoccupation" quant à la situation de Benjamin Brière. Plus récemment, Paris a dénoncé une "mise en scène indigne" concernant les vidéos d'aveux supposés de Cécile Kohler et Jacques Paris, officiellement désignés comme des "otages d'Etat" côté français.

>> Comment Téhéran pratique une "diplomatie des otages" vis-à-vis des pays occidentaux

Mardi 11 octobre, la France a réitéré son appel à la "libération immédiate de tous (ses ressortissants)" retenus en Iran. "Nous devons protéger notre communauté, elle est dans nos cœurs et dans nos actions", a notamment déclaré la ministre Catherine Colonna, qui espérait s'entretenir mardi après-midi avec Hossein Amir-Abdollahian, son homologue iranien. En attendant que Téhéran décroche, et accède aux demandes de la France, le Quai d'Orsay appelle depuis le 7 octobre Français de passage en Iran à "quitter le pays dans les plus brefs délais compte tenu des risques de détention arbitraire auxquels ils s'exposent".

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