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Téhéran tient la dragée haute à Washington dans les eaux du Golfe

L’interception express par les gardiens de la Révolution de deux petits navires de guerre américains dans le Golfe intervient à quelques jours de l’entrée en vigueur de l’accord sur le nucléaire iranien. Fidèle à sa diplomatie de billard à plusieurs bandes, Téhéran a mis à profit un débord américain dans ses eaux territoriales pour rappeler aux Etats-Unis que cet accord ne vaut pas normalisation.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Les dix marins américains, dont une femme (la tête couverte au centre de l'image), égarés dans les eaux territoriales iraniennes, arrêtés et libérés après avoir présenté des excuses et témoigné avoir été bien traités lors de leur brève détention, le 13 janvier 2015. (AFP PHOTO / SOURCE / IRAN'S REVOLUTIONARY GUARDS WEBSITE)

Dans la nuit du 12 au 13 janvier 2015, la flotte des gardiens de la Révolution iraniens a intercepté deux petits navires de guerre américains et leurs dix marins, dont une femme, égarés dans les eaux territoriales de Téhéran près de l’île Farsi.
 
L’incident a aussitôt déclenché une série «d’au moins cinq appels» téléphoniques entre le secrétaire d’Etat américain John Kerry et son homologue iranien Javad Zarif, débouchant sur une libération des équipages américains.
 
«Je veux remercier les autorités iraniennes pour leur coopération et leur réponse rapide, a déclaré John Kerry. Nous pouvons tous imaginer comment une situation semblable pourrait avoir évolué il y a trois ou quatre ans.» Une volonté délibérée de ne pas envenimer les choses et de se féliciter des résultats de la diplomatie Obama.
 
Même satisfaction du côté du chef de la diplomatie iranienne qui s’est félicité du règlement rapide de l’affaire par le «dialogue et le respect» et loin de la politique «des menaces». Pourtant Téhéran, qui avait aussitôt exigé des excuses de la part de Washington, en a profité pour médiatiser à outrance l’épisode.

Les images de marins américains à genoux diffusées sur la toile 
La télévision d’Etat a diffusé les excuses présentées par un des dix marins appréhendés. «C’est de notre faute, nous nous excusons pour cette erreur», a-t-il dit, ajoutant qu’ils avaient été bien traités durant leur détention.
 
Mais c’est surtout les images des marins à genoux sur le pont de leur embarcation et les mains croisées derrière la tête, aussitôt diffusées sur la toile, qui ont frappé les esprits.

Les marins américains capturés par les gardiens de la Révolution iraniens dans le Golfe: des photos contraires aux conventions de Genève. (Capture d'écran sur Twitter)
 
Reflet des luttes d’influence entre ligne dure et tendance modérée au sein du pouvoir ou satisfaction d'avoir mis des Américains à genoux pour montrer que l’accord sur le nucléaire n’équivaut pas à une normalisation, comme l’a dit le guide suprême?

Une leçon pour ceux du Congrès américains qui tentent d'imposer plus de sanctions 
L’incident intervient en tout cas quelques jours avant l’entrée en vigueur officielle de l’accord visant à limiter les activités sensibles en échange d’une levée progressive et contrôlée des sanctions internationales.
 
Le général Hassan Firouzabadi, chef d’état major des forces armées iraniennes, a établi lui-même le parallèle en expliquant que «cet incident devait servir de leçon pour les fauteurs de troubles au Congrès américain», qui tentent d’imposer de nouvelles sanctions à la République islamique.
 
Contraire aux conventions de Genève selon lesquelles les images de prisonniers ne peuvent être montrées, la circulation des photos de Marines capturés a fait bondir Donald Trump, candidat à l’investiture républicaine pour la présidentielle américaine.

Deux pierres dans les jardins de la Maison Blanche 
Pour lui, cet épisode est un témoignage de «ce vers quoi vont les Etats-Unis», a-t-il dit, en raison de l’impuissance dont fait preuve Barack Obama sur la scène internationale.
 
Deux pierres, l’une iranienne et l’autre américaine, dans les jardins de la Maison Blanche, dont le chef affirmait peu auparavant, dans son ultime discours sur l’état de l’Union, «les Etats-Unis sont la nation la plus puissante du monde. Point final.» 

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