Japon : pourquoi les funérailles nationales du Premier ministre assassiné Shinzo Abe font-elles polémique ?
Beaucoup de chefs d’Etat et de chefs de gouvernement sont réunis mardi à Tokyo pour les funérailles nationales de Shinzo Abe, l’ancien Premier ministre japonais assassiné en juillet dernier lors d'un meeting politique. Mais l’ambiance n’est pas vraiment à la grande communion nationale.
Jusqu’au début de la cérémonie, ce mardi 27 septembre, les opposants aux funérailles nationales n’ont pas désarmé. Si des milliers de Japonais ont souhaité rendre un dernier hommage à leur ancien Premier ministre assassiné Shinzo Abe, cette cérémonie de funérailles nationales à Tokyo sont toutefois très controversées dans le pays.
>> Au Japon, les funérailles nationales de Shinzo Abe ont du mal à passer
A côté des Japonais qui faisaient la queue pour déposer des gerbes de fleurs et se recueillir brièvement devant un portrait d'Abe installé dans une tente près du Nippon Budokan, beaucoup de chefs d’Etat de la région Asie-Pacifique ont fait le déplacement dans ce haut lieu de compétitions d'arts martiaux, de concerts et de cérémonies officielles au coeur de la capitale japonaise. Narendra Modi, le premier ministre indien est là, tout comme Anthony Albanese, le premier ministre australien. Il y a aussi des dirigeants du Vietnam, de Corée du Sud ou encore de Singapour. Kamala Harris, la vice président américaine, étaient attendus. Ce sont les représentants des pays qui avaient énormément de relations avec Shinzo Abe. Il avait été au pouvoir près de neuf ans jusqu’en 2020. Et il avait été très actif sur le plan diplomatique pour doper l’aura du Japon.
Reste que 60% des Japonais interrogés disent qu’ils ne soutiennent pas la cérémonie. En cause : l’image de Shinzo Abe à l’intérieur du pays était beaucoup plus contrastée. Une grande partie de l’opinion publique dénonçait le caractère très conservateur de ses politiques. Et l’agacement de la population vise aussi l’actuel gouvernement de Fumio Kishida, qui vient du même parti de droite que Shinzo Abe, le Parti libéral démocrate. Les gens lui reprochent d’avoir décidé presque tout seul, sans aucun débat, d’organiser ces grandes funérailles nationales. Ils moquent aussi le coût de l’événement. Tokyo parle de plus de 11 millions d’euros de dépenses pour quelques minutes de cérémonie.
Des liens troubles avec la secte Moon
Et ce mécontentement pourrait durer au-delà des funérailles, car la population ne digère pas non plus les révélations qui ont suivi l’enquête sur l’assassinat d’Abe.
Lors des interrogatoires, l’assassin présumé a expliqué qu’il voulait se venger de l’Eglise de l’Unification, qu’on connaît aussi sous le nom de secte Moon parce que sa mère avait ruiné sa famille en dons à la secte. Et il a expliqué que la secte avait pu prospérer au Japon grâce à ses liens avec le parti de Shinzo Abe. Et les enquêtes ont montré que c’était vrai.
C’est à dire que le pouvoir japonais a fait preuve de beaucoup de tolérance à l’égard de la secte qui défend les mêmes valeurs conservatrices. En échange de cette tolérance, elle donnait un coup de main à des élus du parti au pouvoir lors des campagnes électorales. C’était des fidèles qui venaient coller des affiches, faire la claque dans des meetings ou qui votaient en masse en faveur d’un candidat jugé en ligne avec la secte. Le PLD vient de reconnaître que la moitié de ses parlementaires actuels entretenaient des liens plus ou moins forts avec la secte. Et ça la population va mettre du temps à le digérer.
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